YDIT-BLOG, Nouvelle saison, Saison 4, épisode VINGT-CINQ : Matin du Jardin. Jardin dans le Matin. Ni baratin ni satin. Ni câlin dans le thym. Seulement le destin.

Note de Madame Frédérique :

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La nuit a été grise, mouillée, on ne sait pas ce que vont devenir les nuages. Jusque-là, on a vu pire. La radio du matin avoue un certain nombre de nouvelles à cause de quoi ça commencera un peu à – tout de même- aller moins bien, le monde en toi, la rudesse ici non nommée, plus mal et même encore moins bien, en toi, sensible au monde.

Puis, ce matin-là, ma vieille (mais alors tu n’étais pas vieille, et tu peines à le devenir ) tu te lèves comme d’habitude. Pas de raison de se presser, s’oppresser.

Ni baratin ni calin sous les thyms du braséro éteint, jour banal.

Lui  est là, il est tout nu, tout près, ce ne sont pas ses usages de pudeur, pourtant, mais tu ne le vois pas encore, pas déjà : tu tournes le dos à la fenêtre, presses le bouton vert de l’expresso rouge : capsule déca. Tu ne t’énerves jamais. Tu es sensible au temps.

Tu t’es couchée tard, soucieuse, après une séquence de froideur. Non, pas vraiment de froideur, tu ne dirais pas les choses avec ces mots à ton psy, tu le rencontres tout à l’heure, ton psy, chaque semaine, pas de froideur mais de …grisaille, comme vous en vivez parfois, James et toi. Vie de couple, et surtout James ne va pas très bien dans le fond de sa mémoire. Il parle quelquefois son malaise, en général il le tait, il se tait, tout se tait. Mais tu sais. Tout se sait.

En somme, une histoire qui semble embrumée dans son brouillard frais : vous avez, non, plutôt c’est lui qui a ergoté sur le concept de misandrie, probablement issu d’une de ces émissions de France Culture qu’il aime écouter en marchant, en bricolant votre maison, ou pendant certains moments de ses gardes de nuit. La dernière Histoire dont il a parlé, c’était une série sur la Saint-Barthélemy, la mort commandée de quelques-uns, devenue anonyme épidémie de meurtres. Cela l’effrayait, la mort collective, pour rien, une idée. Presque, il en pleurait.

Tu ne comprends pas, souvent, ce qui l’intéresse dans cette sorte d’histoires. Mais au moins, ça lui occupe la tête. Déjà ça. Pour certains garçons à qui on a trop et mal occupé le corps, s’occuper la tête ailleurs est une obligation vitale quotidienne. Ydit a organisé autrement sa résistance, lui – déjà dit dans cette saison IV : par la fuite d’écriture. Mais tu ne connais pas le passé de YDIT. Tant mieux.. Le commun d’YDIT et de JAMES, tout le monde l’ignore, et d’abord James. James : tapi dans les plis et les vagues, un rêve de promenade au phare, mais la lumière est éteinte…

Il noie son histoire dans les plis de pierre d’une mémoire mal taillée pour la survie. Et cela est bien, pas de lumière, car sa tête est encombrée d’images, sinon. Pas d’images, non, de brèves réminiscences plutôt. Son Parrain à lui – mais on ne saura jamais le détail de ce qui fut, ce qu’on lui fit, cordon de pyjama ou pas, tant mieux. On ignore et cependant c’est pareil.

Tu t’es couchée tard après cette séquence de grisaille, toi, tu détestes les brouilles, toi, les brumes dans l’affect, les brouillards dans la tête. Tu as mal dormi sous la couette trop chaude, toujours trop chaude. Il faudrait la changer. Mais ce n’est pas urgent. Urgent : continuer. Chaque matin, continuer.

Dans la nuit tu t’es levée pour ouvrir la fenêtre, pour laisser passer un filet d’air presque tiède. Dans votre chambre de l’étage (les chambres des enfants sont au-dessus) les hautes feuilles et les branches basses du châtaignier forment une sorte de halo de fraîcheur. Tu  respires le frais. Tu te penches un peu pour essayer de saisir une feuille, tout en sachant que sauf mouvement favorable du vent ce ne sera pas possible : la banche est trop loin. Dans le mouvement d’extension, peut-être, la courte nuisette de coton léger découvre-t-elle un peu l’ombre serrée au bas de tes fesses. Nul ne regarde. YDIT – un autre jour- aurait sans doute aimé cela,il aime toujours cela, on le sait, mais pas aujoud’hui. Toujours le désir, nul n’y peut rien. Mais non, pas aujourd’hui. Aujourd’hui, découverte de Hanged James. Tout à l’heure.

Pour toi, tirer la nuisette vers le bas, ce n’est pas dans les urgences. Si James surgit dans la cuisine, tant mieux. Déjà ça…

Not yet hanged James n’est pas dans le lit quand, plus tard encore, tu te réveilles à nouveau. Il aurait dû rentrer à la fin de sa garde, et  tu n’as rien entendu. Voilà pourquoi sans doute il fait maintenant un peu froid, c’est l’âpre saveur de l’absence. Le corps de Not Yet Hanged James, tu l’as aimé sensuellement – d’abord à l’école presque mais c’était à l’époque loin du sens-, tu l’as aimé presque chimiquement, comme une amante délivrée, aussi comme une presque mère presque incestueuse qui passe son amour à donner l’apaisement.

Il en fallait de l’apaisement.

Il est si fragile Not Yet Hanged James, ce garçon avec sa blondeur et cette couleur étonnante (émouvante car transparente, agaçante car fragile) que sa blondeur intégrale  pose sur les parts les plus intimes de lui, celle que tu connais peut-être mieux que lui, ce blond qui ne cache rien, roses renflements légers qui apparaissent dans leurs plis et sous le mouvement. A Ydit, ça lui aurait rappelé TYNE, la Blonde Africaine, ou les mousses de FRED. Mais FRED ni TYNE ne sont emplies d’images douloureuses, encombrées de mémoire.

La douleur de YDIt sera, toujours, de vivre l’incompréhension de cette injustice, pourquoi tant de mal, et cette fin de ce matin, à cause d’un pourtant si semblable désastre, Die Pate. .

Tu as aimé cela. Cette blondeur.

C’est loin, à présent, mais tu as aimé cela. Cette pâleur même de l’intérieur.

Tu te dis qu’il a sans doute dormi dans la petite chambre d’à côté, James, celle qui fut construite pour la plus jeune des filles. Vous faites souvent cela quand une vague fraîche vous a séparés pour un soir, pour une raison minime et toutefois cruciale ( c’est toujours comme ça : minime et crucial, voilà pourquoi tu seras surprise, et pourquoi toutefois tu vas tout comprendre ). Not Yet  Hanged James est fragile, c’est ainsi que chez lui le minime est crucial.

Tu as sommeil encore, il est tôt,  mais plus envie de te rendormir. Tu ressens le désir de le retrouver. De parler avec un café. De se regarder, se réconcilier, bonnes habitudes. Il doit être, maintenant, assis à la petite table ronde dans la cuisine, même si tu n’as pas entendu le bruit sauvage de la machine Nespresso. Il y a longtemps que cela ne t’était pas arrivé de manière aussi impérative : tu éprouves le désir de l’entourer des bras, de l’embrasser comme on s’embrasse dans les débuts, ou entre les enfants, et peut-être aussi es-tu dans le désir de le reconduire dans le lit, même si vous n’avez pas trop le temps, pour un rapide mais intense câlin du matin. Jadis, vous le faisiez parfois. Vite et en riant. Jadis.

Dans le lit, sans trop de temps, mais voilà aussi à quoi on reconnaît les amants. Vous aimiez beaucoup cela au début, il disait « Un café, un dodo, et hop, prêts pour le boulot ».

Sans le savoir, du coup, tu restes dans la nuisette légère, laissant sur le bras du fauteuil le gilet tricoté main dont tu te chauffes d’habitude au lever.

Dans la cuisine, parce que tu cherches d’autres capsules Nespresso dans une boîte sur l’étagère du fond, tu ne l’aperçois pas tout de suite.

Tu ne vois rien. Il disait souvent cela, dans les mauvais jours : « Toi, tu ne vois rien ».

Ensuite, tu l’aperçois, soudain, de  trois-quarts, dans l’angle du regard, et aussitôt tu te tournes pour lui faire face.

C’est ici qu’il est.

C’est ainsi qu’il est.

Voici l’homme.

Hanged James.

La branche est assez haute. Il a utilisé le grand escabeau, celui qui sert pour cueillir les fruits les plus élevés, et maintenant il est là, dressé,  pour toujours en toi devenu :

Debout derrière la fenêtre, tu regardes dans le début de votre jardin, et toi tu as le visage au niveau de son plexus. De son cœur. De son estomac. De sa nudité morte. Sa nudité salie de James désormais Hanged. Sans rémission. Cette fois sans rémission.

Lui tourne encore très légèrement. Il ne se balance pas, il tourne. On voit bien que c’est fini. Lui, c’est fini. Tu regardes, un peu noyée dans la stupeur, beaucoup brûlée dans l’émotion, mais tu savais qu’il tenterait cela, tu ne te le disais pas, tu ne te le disais plus depuis qu’il avait raté une autre fois, mais tu le savais. Cependant : pas ainsi, pas cette ténébreuse surprise au réveil. La fois d’avant c’était la taillade, veines tranchées dans l’eau chaude et la baignoire.

Assez de chance pour que tu rentres à temps.

Cette fois c’est fini. Pour de vrai. Il ne t’a pas offert ta chance de décrocher. Gérard Garouste peut bien, dans son tableau Pinocchio et la partie de Dés, se frapper la tempe et rigoler malicieusement, cette fois c’est la bonne. Il tenait beaucoup à son apparence, à la netteté de l’apparence. Voilà pourquoi sans doute il est nu : le moins souillé possible par ce qu’il advient sous hanged.

Le médecin dira que « c’était vers 4 ou 5h du matin, et d’un seul coup« . Hanged, c’est sans  recours, les toutes premières minutes passées. Ensuite, pas de recours, pas de retour.

Maintenant il est 7h, et c’est là, devant toi, encadré dans la fenêtre, et ça continue à tourner très lentement.

Tout ce qui se déroule ensuite, on n’en sait rien, on le devine, ou plutôt viennent toutes les questions qui resteront sans réponse faute de t’être posées : qui préviens-tu en premier ? As-tu essayé quelque chose pour si jamais, encore ? Une fois qu’ils sont arrivés, que font-ils de l’escabeau repoussé ? Ils le redressent et s’en servent pour le descendre ? Comment fait-on, fait-il, l’homme, là-haut : quelqu’un dénoue ? On coupe la corde ? À quel moment la cellule d’aide psychologique arrive-t-elle pour te porter secours ? Quand les brancardiers l’ont emporté, y a t- il quelqu’un qui vient ensuite pour nettoyer ce qui était issu de lui pendant la pendaison ? Ou bien on s’en fiche : c’est le jardin, sous l’arbre. Et quand on l’a décroché, aussitôt, ce n’est plus que le jardin, à nouveau, dîners d’amis l’été, fruits hauts.

Un jardin libéré de son pendu revient au primordial de la terre.

Jardin du matin.

Matin dans le jardin.

Noms pour des parfums de chez Hermès.

Et, aussi, c’est une petite maison propre dans une banlieue paisible. Jusque-là, tout allait bien. La nuit avait été grise, mouillée, on ne savait pas ce que vont à présent devenir les nuages. Des voisins vont s’éveiller, regarder la voiture rouge.

Jusque-là, on a vu pire. Pas toi.

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YDIT-BLOG, Nouvelle saison, Saison 4, épisode VINGT-CINQ : Matin du Jardin. Jardin dans le Matin. Ni baratin, ni satin. A suivre …si on peut ? On respire, on prend un verre, on se retrouve le 6 mars n’est ce pas ?( encore un mercredi, la Sainte Colette, donc ce n’est pas le jour de plaisanter…)

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YDIT BLOG, Nouvelle saison, Saison IV, Episode VINGT-QUATRE : BLESSER LES DIMANCHES, 2 sur 2, Fin, il veut incendier les genoux de M.M.

Voici le 21 février, les mercredis de YDIT, pas seulement ce 21 février, maisdepuis le 14 février pour commencer – oui – pour une succession de trois épisodes que ( sans les relire) on sait cousus de peine et taillés vifs dans l’étoffe de la tristesse. On aura fini avec « ça » le 28 février- une année bissextile, c’est bien qu’il y ait du reste pour souffler.

Die Pate, ce temps-là, hélas revenu avec les « aveux » de tous les autres suintant leur détresse et leurs coupables,   ces années, surtout, ce sont des millions de dimanches sur les genoux de MM Marcel Malbée, dit Le parrain, tout le monde l’appelle sans article « Parrain ».

En image- mensonge et vérité-, même quand le vieux poele à charbon de la pièce à vivre s’essoufle ( car le charbon est coûteux)- le gamin apparaît en short dès que le temps le permet. Vieux pull en grosse laine provenant des bonnes oeuvres de la paroisse mais short – de scout sans patrouille? De filles intranquilles ?  Marcel Malbée – invisible toujours- lit longtemps et commente un peu un étonnant périodique, « l’Os à moelle ».

Toujours, après le déjeuner à quoi participe Grand-Mère-Savait ( on racontera cela ), un geste ( un cocker ferait de même), affectueux geste, accueillant, et YDIT apparaît comme un double sur les genoux de Marcel Malbée, assis en équerre, ou assis les cuisses en parallèle. Ce qui est mieux. Pour Parrain. Pour la chaleur, la fraîcheur, la tiédeur, la candeur ( fausse )( dès l’après première fois, où ne fut pas dit « non »)

Le gamin ne perçoit rien de l’émotion probable, Parrain presque toujours pose une main sur une cuisse, affectueux Parrain, mine de rien Parrain, petit plaisir Parrain, pose une main très au chaud la-haut,le gamin ne sent pas de chair qui vibrerait, rien, mais c’est la place du gamin aussi, pour les milliers de dimanches, pour vivre, cuisse à cuisse les longues, si longues, ennuyeuses,

si ennuyeuses, interminablement reprises et toujours plus ennuyeuses, parties de MONOPOLY. Parrain et lui sont assis à la table de bois, à demi débarrassée.

Au centre, un saladier, qui sert aussi de cendrier.      

Presque toujours, l’une des mains de Parrain est posée sur une cuisse de gamin, ce qui doit être un souvenir mensonger. Car comment jouer au Monopoly d’une seule main? Le gamin n’achète ni ne vend, c’est Marcel Malbée qui joue pour lui, c’est Marcel Malbée qui joue avec lui, et c’est Parrain qui lui tient gentiment la main pour le mouvement des cartes, des pions, des billets, des maisons, comme c’est attendrissant, il s’occupe bien de son filleul, non ? Il lui apprend bien les gestes, non ??.

Au cours du jeu – mouvementé, conçu ainsi-, Parrain par instants recale le gamin aussi près que possible sur les genoux. Sans l’étoffe, jolies petites fesses rondes, les laver ensuite, conseil de la mère quand il revient des nuits chez Parrain, plus tard. Mais il y a l’étoffe. Pour l’instant ?

Entre le repas et les parties, ou quand chacun s’est tout de même lassé de l’inepte jeu (acheter des « maisons » avec de faux billets tandis que le charbon manque un peu…), la famille s’occupe. Parrain lit son journal. Les autres suivent des westerns sur l’écran, qui vient tout juste d’arriver ici, cadeau ( ou salaire?) de parrain à noel. Ou des cartons gris à lettres amovibles blanches qui annoncent les résultats des matchs,

Brive 15/Aurillac 12.  Dimanche, c’est match.

Entre deux séances-genoux ( quel jour Parrain retrouve-t-il le gamin sur ses genoux alors qu’a eu lieu depuis peu l’immémorielle « première fois »? Et que YDIT « non » n’a pas dit. Pas dit « NON », et maintenant ce dimanche le voici à nouveau qui s’étale cuisses nues dans son éternel short, malgré le froid, sur les chauds genoux ? Quelle complice confusion, et dans l’avenir, donc, d’autres fois prévisibles ? Dès la deuxième fois, puisqu’on n’a pas dit non, il y aura une vingtième)…

Entre deux séances -genoux, avant l’heure de raccompagner à trois (Père, Parrain, Ydit) La Grand-Mère-Savait jusqu’à sa maison de retraite, Ydit met en scène de façon éclatante (et sans le savoir), ce qu’il voudrait pouvoir dire, ce qu’il faudrait savoir faire advenir, ce dont il faudrait ne pas se souvenir.

Par le jeu, du maquillage, il dit, Ydit, tout ce qu’on devrait savoir, mais personne n’écoute, personne n’écoute jamais, peu importe au fond, pas la peine d’écouter, de faire encore cet effort, de faire l’effort de faire semblant de l’effort, puiqu’ils savaient, tous, ils savaient, tous ils savaient, tous ils le savaient, qu’il ne faut pas oublier de se les laver quand on va (désormais) chez Parrain, et tous se taisaient.

Dimanche, dix fois : le gamin va dans la cuisine carrelée, petite, mal tiédie par la cuisinière qui sert à chauffer l’eau des ablutions du dimanche matin, encore un peu propre. Là, Ydit caché se travaille le masque, se compose le visage et s’expose (sans le savoir), le message.

On l’aperçoit, dans son short beige, les fesses posées contre l’émail protecteur de l’évier par endroits éclaté. Il a posé le petit miroir sur la table à toile cirée. D’une entorse ancienne il reste une bande de soins. A l’école ( plus tard au collège ? ) la maîtresse veut quelques tubes de gouache. Le gamin s’entoure le front, serré, fort, et dans la glace impose à son crâne une marque d’impact rouge, de balle, venue de Western à la télé sans doute, sans savoir au fond à quel agaçant jeu il convoque la famille. Qui ne voit.

  Quand il revient dans la salle à vivre, la Grand-Mère-Savait se montre agacée, ce gamin est stupide, et ça gâche la peinture, c’est cher. Mère ne dit rien, elle fera la lessive, et c’est un petit garçon si gentil avec tout le monde, et premier à l’école, il faut bien laisser passer quelques babioles.

Dans la cuisine, Ydit reste seul, on ne s’occupa pas de lui, on le sait un petit garçon sage qui ne ferait pas de vraies bétises. Il pose sur un peu d’eau la coque en plastique du petit bateau de pirates reçu à noel, jouet récupéré dans les offrandes de la paroisse de la Sainte Famille, pour les pauvres du père Martin, rue Paul de Kock.

Cette fois, le gamin perce la coque, avec la pointe de l’épluche-légumes, et il s’amuse à voir couler dans l’évier le petit jouet. Surtout, surtout bien sûr, il le récupère avant la fin, toujours le récupère, et colle ( colle liquide, filante sous les doigts, blanchâtre, très vite sêche, on peut la nettoyer avec le bord d’une serviette nid d’abeille, si besoin ) il colle sur l’orifice de menus morceaux de celluloid découpés dans les baleines pour chemises que la mère (en cette période) coud à domicile et qu’il va livrer chez la grossiste.

Ainsi, toujours le bateau est sauvé, ouf, coque percée, mais bateau récupéré, donc toujours l’enfant un dimanche suivant, un dimanche toujours, perce de menus trous dans la coque, et regarde le naufrage par lui provoqué, puis peu après par lui évité, c’est vrai qu’on peut flotter malgré l’atteinte ? Ydit ne sait pas le sens du jeu. Il perce, répare, flotte : la vie depuis Parrain.

D’ailleurs, personne ne regarde ces jeux un peu idiots, pourvu qu’on ne dérériore pas trop le jouet, qu’il puisse encore servir, dit Grand-Mère-Savait, quand elle vient chercher un verre d’eau dans la cuisine.   

D’autres fois, YDIT allume des feux divers dans le cendrier très en usage, ou dans le plat à salade resté pour qu’on se mette à jouer au Monopoly. Paisible, sans aucune intention ni fébrilité, il fait brûler tout ce qui est à portée de la main, ça provoque de tout petits feux en vase clos, de la flamme en bocal, de l’incendie sous-verre, une autre chaleur, pas le charbon rare, ni la main de parrain, feu qu’il s’amuse à éteindre avec une mini figurine de pompier, jouet provenant de la paroisse.

Et dans la superbe indifférence générale Ydit fait brûler le jeu, la main de Parrain, les genoux de Marcel Malbée, l’haleine de Die Pate quand on est sur se genoux, les mots croisés de  » l’Os à Moelle », et seule Grand-Mère-Savait, de nouveau dit que c’est agaçant, les odeurs que font les tickets de PMU en brûlant, mais personne ici ne répond, car nul ne s’intéresse à ce qu’on brûle ainsi, dans le vase clos du dimanche, qu’on brûle et qu’on éteint. Parce que, tout de même, avouons-le une fois, encore : on n’a pas su dire NON.

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Didier JOUAULT pour : YDIT BLOG, Nouvelle saison, Saison IV, Episode VINGT-QUATRE : BLESSER LES DIMANCHES, 2 sur 2, Fin, incendier les genoux de M.M.  PIRE à VENIR , La semaine prochaine, l’apparition dans la fenêtre, douloureux épisode.

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YDIT BLOG, Nouvelle saison, Saison IV, Episode VINGT-TROIS : BLESSER LES DIMANCHES, 1 sur 2, Début, les contours d’une image trop perdue.

Note de Madame Frédérique :

LETTRE de A., Version B.     

Marcel Malbée se mue à jamais en indescriptible fantôme : la mémoire, de lui, violemment close, ne conserve que les ombres, les toiles de fond, les voisinages, les traces. Pour cette histoire, banalement, les jours s’ignorent les uns les autres. Ils se confondent comme s’ils ne glissaient pas, rusés, malins comme la peau mirabelle d’Adèle sur la terrasse ( revoir épisodes 16 et 17, décembre 2023) , comme s’ils ne couraient pas, tortueux tels un lézard, s’ils de résonnaient pas, méticuleux et pédants comme une parole de professeur qui récite les Maximes d’un Duc : épisodes récents ( janvier 2024), même si les semaines passent, ici depuis le mois d’août 2013, si loin, si près, tant de mots ; ou encore aussi (aussi et autrement) comme si le pendu dans l’horloge, par son battement si conforme, métronome du mal-guérir, implacable mesure de ce qui ne passe plus, ne passera plus, comme si Hanged James ne marquait pas l’inévitable progrès dans la mort de Hanged James, ou l’injuste et parfaite légéreté que raconte ici, impertinent, altéré mais intouchable, le narrateur YDIT, narrateur compulsif et menteur.

Définitif dans sa lenteur.

Marcel Malbée, dit M.M., Le Parrain, Die Pate, jamais on n’arrive à faire revenir en mémoire les mains pourtant si lourdes, le visage cependant si proche, ou le dos tourné dans le lit, ou la bouche trop noire.

Tous les jours se copient les uns les autres, et cependant quelques-uns ont été uniques. Mais, déjà écrit et avoué, YDIT reste incapable de retrouver les actes du premier jour, du premier jouir, du premier jet, l’originelle souplesse de la colonne vertébrale et du désir en réponse à la question :  » Tu n’as pas trop chaud, avec ton pyjama?« . Il n’y a plus de première fois. Le début n’existe plus. Banalement. « Cela » ne commence pas. Et donc ne peut finir.

Big Bang initial, inévitable ( car sinon rien ensuite),

et sans représentation ni souvenir, RIEN.

L’imaginer- sous diverses postures et versions-, est facile, on en a vu ou lu d’autres. Retrouver des suites, des enchainements à l’ouverture vive de la cordelette, au glissement suave du pyjama dans le geste des reins, savoir ce que dévoile ce geste aussi est possible (on en a défait des pyjamas, ouvrant sur « L’Origine du Monde », on racontera par exemple, en 2026,;comment Marie-Christine dormait sans ), on sait comment l’imaginer, l’inventer, l’imager, comment se souvenir, décrire : cent et une images, mille et une impressions réveillées depuis les heures vécues avec n’importe qui d’autre, émouvantes heures d’Eros ou tendres heures d’amies : facile.

Mais l’impossible de cette image est par ailleurs formel, radical, terroriste : pour Marcel Malbée, dit MM, Die Pate, jamais, jamais, on ne parvient, malgré tous les efforts, fatigants efforts répétés au début de la réapparition de Marcel Malbée, lors des projets d’écrire ceci, de récit de Y.d’Y dit YDIT le Didi, jamais on n’arrive à faire revenir en mémoire les mains pourtant si lourdes, le visage cependant si proche, ou le dos tourné dans le lit, ou la bouche trop noire, même pas une fraction de corps intime emplissant le regard, non, de Marcel Malbée, dit MM, Die Pate, de lui, rien, RIEN, l’absence de représentation, jamais une image même très parcellaire, même déformée par l’age ou l’usage. Impuissant effort, pénible : Marcel Malbée n’existe plus que dans le décor, le récit, par la bande.

Marcel Malbée se mue à jamais en indescriptible fantôme : la mémoire, de lui, violemment close, ne conserve que les ombres, les toiles de fond, les voisinages, les traces : un chemin de gravillon pour sortir d’une auberge en Forêt Noire et vomir dans les bacs à Camélia,- quelle chance que ton Parrain t’offre un voyage;  la serviette blanche nid d’abeille trop mince épongeant mal des preuves à soustraire à une femme de chambre d’hotel – il est si gentil de t’inviter pour ce week-end à Saumur, où ta grand’mère a tenu un bar PMU; les fauteuils en skai rouge-brun d’une toute nouvelle 4 CV lors d’une excursion à Fontainebleau – c’est la première fois que tu manges des fraises à la chantilly avec glace vanille, ton Parrain s’occupe bien de toi; et les décors, palier, rideau sombre, David en Donatello à fesses jolies, le cosy, lavabo, brosse à dents- tu n’oublies pas de te les laver quand tu vas dormir chez ton parrain après le cinéma parce que c’est trop loin pour rentrer. Te les laver. LES. La mère n’explicite pas ce qu’il semble bien élévé de bien se les laver.

Marcel Malbée se mue à jamais en indescriptible fantôme : la mémoire, de lui, violemment close, ne conserve que les ombres, les toiles de fond, les voisinages, les traces.

Pourtant, avec l’effort, comme une respiration s’implante au cours du Marathon, une permanence d’images s’installe en souvenir, en image de référence, en terre de glaise pour la pioche du souvenir. Inventée ? Reconstituée ?

Die Pate, ce temps-là, hélas revenu avec les « aveux » de tous les autres suintant leur détresse et leurs coupables, ces années, surtout, ce sont des millions de dimanches sur les genoux de MM Marcel Malbée, dit Le parrain, tout le monde l’appelle sans article « Parrain »,dans la famille.

Tant de dimanches et le temps de voir la vie sur les genoux – en imaginant la vie sans les mains de Parrain.         Tant de dimanches et le temps de voir la vie sur les genoux – en imaginant la vie sans les mains de Parrain. Qui avait tant de mains, hier.

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Didier JOUAULT pour YDIT BLOG , Nouvelle saison, Saison IV, Episode VINGT-TROIS : BLESSER les DIMANCHES, 1 sur 2, DEBUT, les contours d’une image perdue.  A suivre, la semaine prochaine, Blesser les dimanches, 2 sur 2 , FIN. Ensuite, en février, à la fin, l’épisode suivant : glacial, frissons dans le dos, hélas. Emotions sensibles, s’abstenir, le 28 février…

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YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode VINGT-DEUX : Entrer en quelque sorte par les fuites, une panoplie de l’évitement.

Note de Madame Frédérique :

Il n’est pas impossible que ce fragment, à vrai dire deux feuilles volantes type cahier d’écolier agrafées, ne figure pas exactement à la place- dans la succession narrative- qu’avait ( aurait ?) prévue mon ex-directeur. Ce n’est pas ( et ce ne sera pas ) le seul  cas d’indécision- y compris sur des alternances de « thèmes » dont je me demande si la disparition inattendue de Y.d’I n’a pas empêché qu’elles fassent l’objet d’aménagements, voire de profondes révisions. J’y reviendrai pour les textes sur l’Afrique, mais il est trop tôt.

Et surtout je garde ma distance.

YDIT : « Lettre de A ». Version B

Ydit a rêvé de trouver une entrée dans les livres et c’est toujours une entrée de labyrinthe, une entrée dans son propre récit, en évoquant tous les livres qu’on a peut-être eu le tort de lire, et ils sont nombreux : par exemple des polars plus ou moins noirs, plus ou moins lourds, lus tard le soir, un peu le jour, sous le grand chêne près de la maison Cucuron, sur les trois  balcons de Paris 12e. Au total ce sont des années sans doute de lecture à vide un peu comme si l’on pédalait sur un vélo d’appartement, sans raison. Mais autour de ces livres surgît nécessairement un paysage, plutôt les mémoires colorées des paysages. Reviennent aussi tous les moments brisés par l’ouverture d’un roman ?

Ce fut même le thème d’un entretien avec le rubricard du journal «  Le Maine libre ». Nous avions sympathisé.

Il rédigeait volontiers des articles sur mon travail. Il arrivait  dans une toute petite voiture rouge, je l’invitais à déjeuner et il acceptait, tous deux sans arrière-pensée. Ensuite on s’allégeait par les paroles comme on enlève un pull rose.

L’un de ces papiers de l’été, sur une pleine page, m’interrogeait sur les conditions de mes lectures. J’avais raconté avoir lu « Les chemins de la liberté » sur un banc, à l’ombre, dans Central Park, en août.

Laurence somnolait à côté.

Tout cela est une autre histoire. Encore une histoire autre. Une Histoire pour faire marcher. Puisque on marche surtout pour raconter.

Sinon, sans récit, à quoi bon marcher ? YDIT aurait pu commencer ce récit Saison IV- par les environnements des livres les mieux lus, les plus épais peut-être, Roberto BOLANO, Jonathan LITTEL, Russel BANKS, Marguerite YOURCENAR, Danièle SALLENAVE, Léonardo PADOURA, Hariki MURAKAMI, Chris KRAUS, Gunter GRASS, Mathias ENARD, Harry MUSLISCH, Vassili GROSSMAN, même Daniel CORDIER ( ceux de la première étagère en entrant, on a évité Dumas ou Hugo ou Balzac, même Pérec, hors concours) évoquant ainsi l’écrin plutôt que le bijou, les décors davantage que la pièce, l’inamovible du souvenir, au lieu de l’incertain qu’est toujours une lecture. Une autre idée avait été de commencer par le récit de fausses lectures, la description de faux romans immenses et superbes, déclarés inconnus, traduits du Finois tel qu’on le parlait avant que La Finlande fût indépendante, ou de n’importe quel autre langage mal accessible.

Des listes ont été ainsi dressées, de romans imaginaires, mais il avait cessé à la page 11. Elles ont disparu. L’ordinateur ne conserve pas les manuscrits, sauf ceux de MarKo.

Car l’idée avait paru désuette, soudain, comme un squelette de littérature expérimentale, un fantôme troué de l’Oulipo, un archaïsme insensé digne de ces troupes de jeunes femmes scouts qu’on croise sur les routes de la Puisaye, ou du Pays Fort, en bande suante et fatiguée, en fin d’après-midi, sourires niais, foulards et chaussettes trempées, fesses et poitrine trop serrées par les catholiques élastiques des dessous de la réalité. On les  retrouve, presque les mêmes, assises,  douchées, lèvres peintes, humeur juvénile, chigons refaits, culottes sèches, à la terrasse de la Brasserie de l’Horloge, un soir de dîner solitaire à Avalon. A les voir marcher en groupes ou commander une salade César, Ydit se demande toujours à quoi peut bien ressembler le corps de chacune, si dissemblable et cependant le même, stupeur continue des désirs ; les corps sont tellement les mêmes – sous  l’uniforme qui défie leur singularité. Derrière l’apparente similitude de leur corsage kaki renforcé de poches et de badges (comme autant de barrières au regard) leurs seins, sur la route, balancent le mouvement de formes différentes dans le rythme commun. Elles se nouent le foulard comme on prépare une corde de chanvre, mais pour de rire.

Une rêverie un peu trop rêveuse les imagine au repos dans la chaleur des voisinages sages et suaves . « La patrouille au sauna » : titre imbécile de film années soixante-dix ? Pendant ce temps la salade Caésar refroidit. Et question basique : points communs du sauna et du confessionnal ? La nudité? L’allègement?

Et, pensait Ydit, on peut aussi, on aurait pu aussi, entrer dans le labyrinthe du livre, ce roman-images de maintenant, épisode VING-DEUX, dans les souterrains secrets du récit, pénétrer  (encore et jusqu’à ce point de fureur puritaine : le logiciel de l’ordinateur, à la dictée du mot pénétrer donne********),  entrer par en quelque sorte les fuites : c’est-à-dire par tous les romans qu’on a lus, ou au moins débutés, au lieu de rester avec les amis, et les femmes, qu’on a aimés. Avec les enfants, aussi, mais les enfants, non, pas dans cette histoire.

Tandis qu’on lisait jadis et naguère, à chaque page qui tournait, à chaque personnage apparu, c’était comme une trahison, comme un lambeau de temps  découpé dans la vie de l’autre. Ainsi, les pages du livre nient peu à peu la présence d’un voisin, parce qu’on croyait que les amours se déclinent au cas de la permanence, un nominatif de la présence, alors que non, définitivement non, aucune durée n’est jamais promise par l’aventure de vivre, depuis qu’on a ouvert un livre et corné une page.

Chaque page lue en solitaire est un pari dangereux fait sur la possibilité que le temps soit durable.

Le beau projet, c’était de raconter en parallèle les fuites ou disparitions d’amis ou d’amantes, pendant qu’on s’abandonnait au roman en train d’aboutir, 150 000 mots qui restent, il y a des mois déjà, roman-images écrit en 2022, repris et imagé en 2023, jusqu’au milieu de l’été, puis ça vogue désormais tout seul pour YDIT, occupé à autre chose ( hormis la relecture de chaque épisode la veille de la parution, sauf manquements, nombreux) roman-images presqu’en voie d’oubli, et dont voici pourtant le commencement longuement commencé, pour vous. Jeux du temps.

Programmer l’avenir avec certitude : l’épisode vingt-trois sera vers mi- février 2024, c’est décidé, en août 2023. Puis de continuer, puis de terminer, en racontant quelques fausses retrouvailles avec les disparus, avec les effacés, un peu comme si le temps pouvait, finalement, sur une terrasse, avec un verre, se faire récompense, croix d’honneur.

Rolin, l’ancien baroudeur clandestin d’une organisation anticapitaliste très virulente, se retrouve bien là. Tigre de papier.

Tous ces commencements sont – ou plutôt auraient été façonnés- sur le même « patron » : une panoplie de l’évitement. Quant à l’éviter, l’effort d’écrire, autant léviter sur la tombe principale d’un cimetière dans la colline éternelle : terrils de souvenirs défectueux.

«  C’est sur nos tombes que le désert avance » chante France Gall, remasterisée dans l’émission de minuit que j’écoute en buvant un dernier verre sur la terrasse du Midi (mais ce n’est jamais un dernier verre), en choisissant sur la carte IGN mon trajet de randonnée pour demain. Une carte, la marche, c’est le contraire même du désert, et j’ignore encore comment on peut vivre dans la solitude, marcher sans carte, et sont fréquentes cependant les fulgurances sur  la certitude de sa propre finitude.

Finir le plan de marche pour demain, terminer le verre, surveiller la nuit depuis la terrasse, deux filles parlent encore, pas loin, cuisses rondes écrasées sur le haut tabouret, elles étaient dans la patrouille mais pas dans le sauna, hélas, deux filles avec leur voix haute ou basse selon l’instant, dernières girls-scouts dans ma nuit solitaire dAvalon, , maintenant les écouter c’est un peu voyager dans l’espace vers le point éloigné de tous qu’on nomme Big Bang.

Les voix des filles, la nuit, font voyager vers le passé de l’homme. «  C’est sur nos tombes que le désert avance », éveillant , ces voix, les fulgurances sur  la certitude de sa propre finitude.

Commencer à se rappeler c’est agacer le monstre, lui verser un peu de citron frais sur les mâchoires, de gingembre sur la langue, de piment au coin des narines : on sait ce qu’on risque.

Par exemple, les deux girl-scout sont Tyne et Jo, nous étions partis à trois en Grèce, et à Piacere en Sicile, à cette heure-ci nous dormions nus enlacés sur la terrasse trop chaude, appartement pas cher, on sait ce qu’on risque, à laisser le souvenir déménager les images. On sait- à présent- ce qu’on risque avec aussi Marcel Malbée, dit MM, Die pate : condamnation à perpétuité.

Tout cela est une autre histoire. Encore une histoire autre. Une Histoire pour faire marcher. Puisque on marche surtout pour raconter.

Sinon, sans récit, à quoi bon marcher ?

On sait que ça peut durer, ensuite, ne jamais finir de remuer, comme une purulente germination des mots. Proust, évidemment : exemple parfait de l’interminable.

Image, cependant, soudain, avant de tenter le toujours dur assaut du sommeil : on se voit en pull vert amande col en V, ridicule et utile ; dans la salle trop mal chauffée du « Comité Paritaire », on peut ainsi enlever la veste sans avoir froid, et faire « commun ». La réunion est à l’agenda, tout un vendredi après-midi. On racontera cela.

Puis dimanche, Foire aux faïences et aux céramiques, à Malicorne, sud- Sarthe, la facture des bols est restée glissée dans l’agenda, l’artisane aux mains roses a peint le prénom des deux filles sur les tasses, pull vieux rose sur les épaules, on craint les froids premiers d’octobre, mais il avait fait beau, à Malicorne, sud-Sarthe, on avait goûté de tartines à la rillette et de jus de pomme, en rigolant, on  avait aussi acheté un table ancienne et quatre chaises pour la maison de fonction, mal meublée.

Leur prix avait fait rire la famille des venus de Paris .

Voici tout cela qu’on pourrait aussi tenter de raconter. Les bonheurs. Les jours. La simple évidence des petits moments sereins et joyeux. Mais à quoi bon ? Et comment cela serait-il encore possible depuis que Marcel Malbée, dit M.M., dit Le Parrain, a transformé son absence en fantôme, son oubli en reminiscence, et qu’il s’est assis, dans le silence, sous l’arbre même où le vent fait encore tourner Hanged James ? Avec la question :  » Il fait bien chaud, tu n’enlèverais pas ton pyjama ? Et jamais sa main n’aide à dénouer le cordon, il faut que le gamin n’aie pas dit « non ».

Soudain, tous deux ont taillé ma mémoire au vif. Ne reste à raconter, pour un temps, rien d’autre que ceci : eux. Statuetteb de David sur le buffet de l’entrée sur Dupetit-Thouars. Chez Parrain, Marcel Malbée. Hanged James sous la branche dans la fenêtre. Depuis la cuisine : roman-images. Il faut bien s’y résoudre. S’y contraindre. S’y abandonner.

Marcel Malbée, le Parrain aux doigts trop chauds/ Hanged James, le Pendu aux cou trop étroit. Un archaïsme insensé digne de ces troupes de jeunes femmes scouts qu’on croise sur les routes de la Puisaye, ou du Pays Fort, en bande suante et fatiguée, en fin d’après-midi, sourires niais, foulards et chaussettes trempées, fesses et poitrine trop serrées par les catholiques élastiques des dessous de la réalité.

Sauf que leurs squelettes font du bruit dans la tête.

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Didier JOUAULT, pour YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4 , Episode VINGT-DEUX : Entrer en quelque sorte par les fuites, une panoplie de l’évitement. A suivre? Oui, si vous désirez savoir comment BOB et MORANE consuisent ( mal) leur enquête…(mais la solde n’est pas mauvaise ). Rendez-vous non pas le 14 février seulement, mais le 14 février pour commencer – oui – pour une succession de trois épisodes que ( sans les relire) on sait cousus de peine et taillés vifs dans l’étoffe de la tristesse. On aura fini avec « ça » le 28 février- une année bissextile, c’est bien qu’il y ait du reste pour souffler.

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