YDIT- TROIS : Saison 3 Episodes à venir, teasing 2/4, autrement dit agaceries anticipatrices : Elles et quelques autres ? Elles et quelques autres !

Il y aura, donc, pour reprendre et continuer ( mais écrire ou vivre est-ce jamais autre chose? ) :

Des femmes en mémoires déglacées avant de servir sur le papier photo, le casting est en cours, car toutes sont du passé reconstitué par les images, mentales et autres : Tyne ? FRED ? Erika ? On demande à voir ? On en discute en regardant passer les mémoires.

Elles, et quelques autres ont pu faire leur bout d’essai dans la Série 2, « Le jardin de Giorgio Bassani », et parfois même auparavant. Avec plus ou moins de bonheur de lectrice, un peu davantage pour le lecteur. On hésite : trop sortir les photos de leur cadre, ça les use. Les y laisser gâche le plaisir du toucher.

Encore un paradoxe du désir, être sans user.

De nouvelles formes du présent, aussi ( au moins en l’état du projet ) : Nadia, la bonne hôtesse- mais il fait si froid chez elle que toute exposition est auto-punitive, dommage !

, Marie-Lou, la bonne coifeuse, mais on va nous dire qu’on se prend pour l’Arthur cherchant des poux, Michelle, la bonne druidesse ?

Michele, oui, au moins elle : toujours porteuse de la bonne conscience souriante, non mais, YDIT, tu ne vas pas faire çà?

Les trois comparses de la fausse « Agence » du Jardin Bassani, Cécile, Marko, Sergui, qui sont encore aimés, on ne les réengage pas : ils ont été trop parfaits. Ils sont trop chers.

Il y aura les traces d’une tendance marquée au choix privilégié de la narration, donc de l’imagination :

Des actions dont le cours incertain ( bourses qui tombent, indices qui escaladent) fait sourire le récitant masqué, jadis narrateur incertain, peu habitué aux vagues de haute mer…

Des scènes dans des espaces sans drame mais pas sans âme. On pourrait suivre YDIT lors de la tournée des séances de signature de ses œuvres incomplètes ( le succès mondial de la Saison2 n’est pas sans créer de nouveaux devoirs ).

Diverses dérives, ou détours qui sont au récit ce que Cannaregio est à Venise, surtout du côté de Fondamenta de la Misericordia ou même du Campo del Ghetto, et d’ailleurs ce que Rezvani ( qui s’en souvient ?) écrit de Venise, c’est faux,  il ment, il voulait plutôt décrire la Série 3 de YDIT, on cite : « la violence de sa précarité », dans «  une telle somme d’inutile », « Mais ici le vécu demeure », et (puisqu’il s’agit de Venezia), on verra des labyrinthes où se perdre est bienfaisant. Même si l’on observe le plan de Venise comme le visage d’une grand-mère qu’on sait ne jamais revoir avant qu’elle meure. Car le pire lieu où se perdre ce sont les méandres intérieurs .

Des passages comme le précédent, faussement lettrés, trompeusement allusifs, tristement tristounets; oui, ça aussi, il y en aura, mais on se retiendra comme on se retient de trop parler, pour ne pas se faire peur avant la nuit, toujours trop forte, la nuit, lente à venir. Et d’ailleurs toute écriture est-elle rien d’autre qu’une tentative malhabile de jouer avec le sommeil, le soleil, venu, pas venu ?

Aussi, des paroles définitives ou des formules creuses, de fausses devises et de vrais alexandrins de pacotille, de l’ironie tendre et de l’émotion mal contenue ( excuses présentées par avance), le tout servi à table et d’une main leste par l’une de nos habituelles figurantes, qui fera vite et bien, ou well and short, donc il y aura…

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Didier JOUAULT, pour YDIT-TROIS, teasing 2/4, autrement dit agaceries anticipatrices : Elles et quelques autres. Pour la suite, question de patience. André Breton n’écrivait-il pas :  » Mon Dédé, t’impatiente pas dans ta cave de Rantanplan, avec tes faux biftons, tes fafiots bénis et ta porte étroite, tu finiras papiste «  (notes inédites, recueillies dans la table de nuit d’Aurore).

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YDIT- TROIS : Saison 3 Episodes à venir, teasing 1/4, autrement dit agaceries anticipatrices : LSD à France Culture ?



YDIT – TROIS / S3 Episode TEASING 1/4. LSD à France Culture

A 75 JE me tire

Quand on marche, dans la campagne  autour de « Chez Nadia« , ça peut servir de se munir de LSD, au moins dans les oreilles.

LSD, « La Série Documentaire », sur France Culture, les sujets d’enquête les plus divers, mais toujours une identique entrée en matière, une minute trente, sur ce qu’il y aura dans les quatre épisodes, cette semaine.

Bonne idée, un peu comme pour un menu d’un soir avec invités ( les soirs sans invités, suffit le brouet monacal de marcheur solitaire).

YDIT -TROIS, série 3 ( certaines voitures aussi, les plus en haut du luxe, ont des «  séries », ici on saura plafonner l’ambition à la dimension du modeste )(Croyons-y !).

Il y aura une limite fixée avant même de commencer à jouer : «  A 75, je me tire », slogan ou horizon ? 75 degrés Celsius ? 75 pages de Maurice Sachs ? 75 marches pour descendre chez les Caves ou monter jusqu’aux Oiseaux ? 75 euros /an l’abonnement à YDIT-BLOG ?

Il y aura les éléments aujourd’hui les plus controversés d’un texte narratif : des personnages. Oui, c’est dangereux pour l’image : toujours difficile à trouver dans les collections personnelles, ou sur le net. Quasiment impossible à composer sur mesure- d’où la démesure choisie des illustrations, en général décalées, menteuses, ironiques. Même, on rencontrera des narrèmes, ramassés à la pelle, il y aura ( pour mémoire, si on ose dire: le narrème est au récit ce que la fréquentation des étoiles est à l’astronome, ou l’astrologue, c’est pareil, ça raconte le passé ou le futur, peu importe, ça raconte. Que « ça » raconte est justement le problème) il y aura du Récit, du Rassi, du Voici , du RAISSI, en somme.


Et parmi les personnages , dans la distribution actuelle –

YDIT- déguisé en vieux détective sans pipe. En fait, on cherche encore son costume. de s’aime. De sème. De scène. De Seine.

Totor, polygraphe panthéonesque. Il succède à Voltaire des Séquences Publiques d’Oubli, qui s’est décommandé, fatigué de ses apparitions en vieux chat lors de la « Série 1 », celle des SPO. Parti, Voltaire dit V3, marcher ou rêver d’autres horizons

pour son âge

Didi ( surnom goguenard de Denis le Diderot) a été pressenti par la prod qui vend la Série même en URSS, enfin chez les Russes. Il hésite : ses convictions sembleraient de plus en plus archaïques, dit-il, le conduisant à craindre le ridicule dans un monde sans Catherine et sans Grandeur – et l’on peut craindre qu’il ne se trompe pas.

A vue d’œil, la LUMIERE s’archaïse, l’Encyclopédie se rationne,

Jacques se défatalise, résigné plutôt… Il y a fort à faire dès lors pour l’autopsie du futur ! Jadis, une comparse d’YDIT aurait murmuré, lasse : « Encore une de ses formules pour brosser le vent dans le sens du poêle, rien que de la fumée sans jeu ».

Des Frères, on en verra sans doute un peu : un vrai, des faux, un vrai défaut, les frères ? On en trouvera, des Frères, c’est ce qui globule, circule, nodule, bascule, conciliabule, bidule, animalcule, annule, postule, préambule, récapitule …( j’ai sauté plusieurs écrans du dictionnaire de « Je-rime.com! », conseillé pour les matins de détresse, de bouillabaisse, de hardiesse de Hadès, de prouesse avec larronnesse sans richesse mais pas sans noblesse, ou même de pataquès car un sot-l’y laisse sans promesse). Des Frères et aussi des Sœurs – mais pas beaucoup.

Peut-être un  père blanc, aussi ? Mais ses apparitions en clochard ivrogne et démasqué lors de la Série 1 ont suscité des reproches.

Des femmes, enfin, habillées en mémoires déglacées avant de servir sur le papier photo, le casting est en cours, car toutes sont du passé reconstitué par les images, mentales et autres : Tyne ? FD ? Erika ? On demande à voir ?

De nouvelles formes du présent, aussi ( au moins en l’état du projet ), sans doute, il y en aura : Nadia, la bonne hôtesse, Marie-Lou, la bonne coiffesse, Michelle, la bonne druidesse. Les trois comparses de la fausse « Agence » du Jardin Bassani, Cécile, Marko, Sergui, qui sont encore aimés, on ne les réengage pas : ils ont été trop parfaits. Ils sont trop chers.

________________________________________________________________________________________________________________Didier JOUAULT , pour YDIT-TROIS Saison 3 Episodes à venir, teasing 1/4, autrement dit agaceries anticipatrices : LSD à France Culture. A suivre ( jusque là, ça va ? Arthur Cravan, entre les cordes, aimait à dire -sans retirer son protège-dents : « ejzkdpmlezq« …

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YDIT- TROIS : Ainsi qu’annoncé, tant de fois, exactement 14 , voici « Préviously », c’est le n° 15, joli chiffre, et voila que s’achève la longue (mais jamais assez longue, car la mémoire est plus courte que la vie, tel fut le drame terminal de Bassani) série anecdotique et sensible des PREVIOUSLY – « SPO » et Jardin de Giorgio ,Bassani ». Au cœur (mot choisi) des 99 posts du « Jardin de Giorgio Bassani », il y eut cette apparente coupure de la fuite à Taxos. Ce fut la publication mise en ligne, telle quelle, le 22 aout 2020 – en ce jour, revenu à Paris, je vis que j’avais 70 ANS. En ce jour là, oui. Ca y est , voyez-vous ? Les séries s’accordent pour une certaine continuité, la mienne, celle du récitant, la vôtre celle des patient(e)s. AU moins, sur un mode PROVOCATEUR ( mais écrire c’est affirmer l’IMPUDEUR MAJEURE ), ce jour là encore, le soleil se regardait en face. Donc, « replay » : ce fut, c’est encore, ce ne sera plus : ENTRACTE  6/6 /PIQUE NIQUE A TAXOS, sixième et dernier mot,  le nu vêtu et dévêtu par on ne sait pas trop qui même (et aujourd’hui on a bien tous les droits?)

IMG_1079 ENTRACTE  6/6 :

PIQUE NIQUE A TAXOS, sixième et dernier mot,  le nu vêtu et dévêtu par n’importe qui même ( et aujourd’hui  justement on a bien tous les droits?)

Perplexes depuis le coin de la rue, l’essentiel dans le regard, les Hôtes Absents mais attentifs suivent activement le sein du dessein comme les pérégrinations mentales ou plastiques du Narrateur.

« Fais gaffe, dit Jérémie le psy, dont Germaine désormais se fait accompagner partout, elle en rouge qui enrage, lui en bleu éblouissant, jolis comme une sortie de tranchée Garance, accompagner depuis que tout le monde peut grimacer des dents sous son Covimasque, fais gaffe, te mettre à nu dans l’atelier de Taxos sans réserve ni même un pagne au détour d’un sentier de chèvres, te faire portraiturer l’Integral Épiderme par des personnes de rencontre à la moralité incertaine, t’asseoir sans rien pour te couvrir dans l’immense lumière de l’autre terrasse ( les voisins Achille et Nausicaa ne sont pas encore arrivés pour l’été), c’est donner peut-être la viande à déchirer par les  chiens asociaux et simples des réseaux… »

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D’accord, poursuit-Il, on sait bien que ces poses sont pour le regard précis de quelqu’une, et pas seulement pour toi, mais je te le dis l’ami qui sent l’anis, le thym, la myrrhe et le cabri, et le répète, te montrer ainsi mis à nu par tes faciles rencontres jamais ne dément le chiffre pas secret d’une blessure que toute exhibition narcissique avoue sans réserve…Et, ça, terrible.

Le galimatias pédant du voyageur me fait rigoler, je lui sers un nouvel ouzo, le troisième, qu’il méprise en écrasant de glaçons, et remplis la coupelle de cacahuètes grillées. Trois ouzos, trois mousquetaires, trois poses ( la même et cependant une autre ?)

 Entre temps, CLAUDE avait envoyé un texto : «  C’est amusant ici, sur l’île, j’ai bavardé avec un Moldave qui tend des fils de clocher à clocher, près du musée vide consacré à la poésie des Cyclades. Finalement on va dîner ensemble, aussi  je dois venir plus tôt chez vos amis absents, et pas plus d’une heure. Nous mangerons la lumière d’été sur votre terrasse et je sais comment manipuler une image pour -avec du jour-faire la nuit. Préparez le vin, j’apporte le geste, Vale. »

TAXOS appelle d’autres images ?… Il se peut que les mémoires photographiques s’emmêlent un peu dans le souvenir et l’imaginaire du Narrateur, et que l’illustration malicieuse de cet entracte anticipe sur la reprise à venir du récit majeur : « Le jardin de Giorgio. Bassani ». On ne peut pas en vouloir au Narrateur Spéculatif d’être un peu un Raconteur Alternatif. Pendant l’entracte, on peut encore rêver un peu à la suite du scénario, comme si tout n’était pas déjà donné, puis l’annoncer par un clin d’œil : voici donc ici la future Erika de Mantoue. Saluts à Erika (toujours bienvenue quelle que soit sa langue !)

Le foyer du théâtre fait autant de bruissements et de ruines qu’une pièce de Shakespeare mise en scène par un lecteur de Kafka et joué pour le club  » Bonjour la comédie » d’un Camp de jeannettes (si jamais cette sorte de choses a le malheur d’exister encore). Il est difficile d’y tenir une conversion qui ne se bornerait pas au décompte des bulles dans la coupe.

-« Cependant, grogne V3, dit Voltaire, faux frère s’il en fut, pourtant, naguère quand l’heure venait de projeter les images de contes ou de voyages, et je m’y connais, il fallait changer la bougie, au moins avait-on le temps de regarder. A présent ( il tapote l’écran de son vieux doigt d’écrivain mourant, néglige l’aspersion d’hydroalcoolique) il suffit d’une pression pour qu’éclate le corset de la mémoire ». Et le corps se libère alors. »

V3 fait défiler des images où, c’est juste, on ne peut pas regarder YDIT Le Narrateur Spéculatif sans sortir son masque, son face-à-main, son pinceau à caviarder le trop montré. A nouveau je souris : poser du noir sur du noir, couper juste à temps, barrer d’un trait coloré ou nier d’une touche rose, n’est-ce pas tirer le regard vers ce qu’on refuse de laisser voir, et qui ressemble du reste ( s’il en reste !) si stupidement à tout ce que tout le monde peut voir ici et partout?

Je n’ai, ajoute YDIT, de pudeur que pour mes histoires du dedans,

« Sur les illustrations de YDIT, d’accord, c’est la balade tête lâchée, oui c’est l’entracte (qui touche à sa fin, notez ! ) mais on se demande, murmure Germaine, on se demande tout de même si tout ceci ne devient pas super, comment dire, scolaire? Tout à l’heure, ne m’en veuillez pas, YDIT, si on vous laisse faire, vous allez nous assourdir de synecdoques sournoises ou de métalepses coquines, sans oublier cette écolière ribaude, l’anacoluthe, toujours  à chercher une liaison!« Serait elle purement visuelle ? Monter pour descendre?

-« Et on attend mieux -ou bien pire encore, ricaneV3, – de vous que la pédanterie tartinade en WordPress, et Même en WordPress deux fois par semaine, ça fait beaucoup, ne trouvez vous pas ? »

LA VENGEANCE DE LA FILLE EN SHORT ?

Le type tant et trop de fois montré à poil justement aujourd’hui, et pourquoi pas soixante-dix fois ( on sent que ça ne lui aurait pas complètement déplu à Vassiliki), c’est un peu la vengeance de la fille en short, non ? L’exposeur a son tour exposé,  bien fait, bien joué ?«

YDIT, que rien n’affecte pourvu qu’on parle de son texte, car c’est encore la plus habile manière d’éviter qu’on parle de lui, reconnaît que l’illustration pour lui à chaque publication, se donne seulement avec un certain sourire, un sarcasme attendri dénué de cynisme ou d’amertume, un jeu de contrastes, de démentis que l’image oppose au texte, et, comme il perçoit la renaissante lassitude chez Germaine, préfère laisser les comparses ripatonner en scène.

-« Quelquefois quand même », ajoute la Russe Vassiliki ( ah, retrouver ici son accent de Verveine poussée en Sibérie est un bonheur-du-jour sans mélange, bonheur des personnages Renaissants et Résistants) , quelquefois et même un plus que cela, on sent que vous avez eu la flemme. Vous écrivez cheval et montrez une selle, des naseaux, même un facteur, fastoche… »

Les plus fidèles des ZadYdits ( ainsi se sont désignés entre eux quelques lecteurs qui se retrouvent au café Georges Bassane, rue Belles Fleurs ) savent toutefois que s’il évoque ( on se demande pourquoi !) une gaie voltigeuse, plutôt qu’un si léger Degas ou un troublant Toulouse Lautrec, Le Narrateur Spéculatif montre plus volontiers une belle image de Percheron bien rond, quoique non buveur, lui.

Des fatras de ce méli-mémo du foyer dramatique, YDIT reprend, et répète que, à ses propres yeux, l’écran propose à chaque fois, à chaque post, une construction d’échos mensongers  texte-images menteurs vraiment, de préférence en contradiction et en défaut grave de sérieux. Hélas, la lecture ailleurs que sur le site originel, WordPress, déclenche des cascades imprévues de décadrages et glissements, mais on peut encore tirer malgré tout le fil du sens et des contresens que l’effort long de mise en page tente de produite, au moins de suggérer.

-« Chaque mot publié est un coin de peau dévoilé, sourire en sourdine, et gamineries en prime. À cet âge, on croit pouvoir tout se permettre, murmure avec bon sens Germaine, on n’a plus trop de temps pour le reste. »

IMG_3626Mais chut, le drame reprend sur la  scène.

Aujourd’hui même s’achève un certain entracte. Le temps s’élève il est temps de rire.

 GENDARME ! VITE, VITE, VITE :  TROIS COUPS ! RIDEAU !


Didier JOUAULT , pour YDIT-SUIT,  ENTRACTE 6/6 : PIQUE NIQUE A TAXOS, sixième et dernier mot, le nu vêtu et dévêtu par on ne sait pas trop qui même (et aujourd’hui on a bien tous les droits?). FIN .

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YDIT-TROIS, comme annoncé, d’abord « PREVIOUSLY » 14 – éditée le 14 , bien sûr : encore la deuxième saison, celle des voyages en villes italiennes du nord, et le si long arrêt sur images de FERRARA, l’éblouissement des ruelles et de l’Histoire, l’accueil révolutionnaire des Juifs par un prince Renaissant, les mages et Silvia en images-l’absente hôtesse, de qui naquirent les pages puis les posts du « Jardin de Giorgio Bassani ». Voici donc la…rediffusion telle quelle de la séquence 75, datée du 10 avril 2021, où l’on peut revoir ce moment où le narrateur éparpillé se recolle soudain en découvrant LA MAISON de GIORGIO BASSANI, origine et but . »YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 75/99, milieu du chapitre 24″.

Reprenant le parcours depuis la piazzale medaglie d’oro, je rameute les souvenirs des errances d’avant. Lors de mon premier passage, encore préservé de mon actuelle et de plus en plus nette addiction à la quête du jardin, avais-je pris la petite rue Caneva ? Suivant à leur pied les remparts, ici plus que jamais imposante masse de terre et de briques couverte de gazons et d’arbres, je tâtonne, comme un navigateur aveugle attaché à son mat.

Sur une vitrine de pharmacien, j’espère non paralytique, le thermomètre dit encore : 36, et parle en Celcius.

Une fois de plus, je longe la caserne abandonnée, via Scandinavia, des guérites de guet aux toits perdus ‘terrain militaire, surveillance balles réelles’, on croirait qu’ils défendent la maison Bassani et ses souvenirs privés les plus intimes. Poussé dans le dos par les cauchemars des fusils, et la veille assoupie des soldats d’hier, je sens comme les sifflements des souvenirs qu’on tire à balles réelles et à bout portant derrière mon dos, je file, je fuis, j’essuie, j’y suis ? Effrayé, effaré ?
Le chemin est devenu parcours, ma route épreuve à toute épreuve, ma déambulation errance, mais j’aime avec joie cette façon de me croire …

…perdu dans les entrelacs d’une ville absolument cartographiée, restituée en 3 D par n’importe quel GPS.

On se fait peur en croyant explorer un paysage pourtant déjà connu, c’est ce qu’on appelle vivre.

L’ombre lentement pousse sa marée sur mon visage de marin, comme une lèpre qui serait le passage du jour. Jean-Jacques disait un soir, nous étions sept attendant l’ouverture : «  Quand le patient parle, je n’écoute pas les mots, je n’entends pas le sens, je ne perçois que la musique de l’inconscient, ce langage des sons qui structure sa mémoire, invisible, cachée, livrée, parce que dans cette musique écrite d’elle-même se rencontre la vérité. »

Je tourne trop tôt dans une petite rue dont le nom ne figure pas sur le plan de ville, et que j’ignorais.
A force d’insolence indolente au soleil je frise l’insolation ? L’isolation ?
A plusieurs reprises je retourne en arrière, reprends une ruelle aguichante, renonce à son espoir de galets ronds durs au pied, reviens.La certitude visible et protectrice de la Mura, sa masse roux-vert, me rassurent. Ici l’horizon est proche et immobile, la clôture apaise sa certitude. C’est le piège dans lequel nous vivons tous, le désir de rester protégés, le désir imbécile qui affadit tous les autres, dont celui de sortir en pleine terre, en pleine lune, exposé à toutes les surprises, explosé peut-être.

C’est ainsi que j’entends les rebonds des balles de tennis. Fatigué, pensée morte et tête usée, on écoute mieux. Épuisé, on écoute tout. Mourant, on peut alors écouter la profondeur ?


Les mêmes balles jaunes que deux mois plus tôt, celles – bien jaunes- qui s’écrasent parfois en tâche d’étoile sur le poitrail, sur le revers, à gauche.
Petite place, jouxtant le musée presque vide, Palazzo Bonasconi, réduit à deux salles par « Les Travaux ». J’avais bien entendu visité, devoir interne oblige, puis laissé une phrase gentille lors de mon précédent passage, il y a quelques semaines. L’envie d’aller roder du côté du tennis est forte. Mais j’entre d’abord au musée : à cela on repère mon âge. Dans la cour, on voit toujours la petite FIAT blanche portant le lettres noires ‘Comune di Ferrara ‘.

La fois d’avant, je l’avais utilisée pour mon blog, la décorant d’étiquettes, cartes de visite, ruban bleu, lunettes à grosse montures bordeaux, les accessoires usuels des anciennes  » Séquences Publiques d’Oubli »( voir infra , post 1 à 175). C’est cela qui m’avait dissipé, détournant l’attention de l’essentiel, des maisons voisines.

J’étais passé devant elles sans même les regarder, je marchais stupide, quasi démarche d’aveugle sans canne, en visionnant debout les photos à l’instant prises sur le Nikon pour mon blog alors vivace : ydit-blog.

Gonflé de présent, on paie le futur.


Après la visite, je pénètre dans le saint des saints du Jardin des Finzi-Contini, le Tennis. La partie est rude, l’acharnement sur les balles les transforme en boulets. C’est cossu, protégé de belles briques, entouré d’arbustes, de lauriers, d’acacias, d’un Club House très confortable.
Pas de surprise : « C’est réservé, c’est strictement, c’est aux abonnés, c’est interdit sinon, c’est dit, en 38, déjà, « lois raciales », c’était dit. Deux sexagénaires en forme haut de gamme jouent contre deux femmes beaucoup plus jeunes, mais pas moins dorées. Les quatre m’ont observé avec une méfiance accrue lorsque j’ai photographié la plaque émaillée un peu écornée, peu visible sous les feuilles, qui rappelle cette exclusion –bien réelle- de Bassani, dès 38, parce que juif, simplement « israelite », en juillet, l’un des fils rouges du «Jardin des Finzi-Contini », Bassani qu’on voit très souvent, dans les biographies, en large short blanc ou sur un court, et qui a été champion régional.
Je regarde, je savoure, j’écoute, ça les ennuie, je les emmerde ( parfois, un peu de vulgarité traduit l’intensité).
Quittant le club entre deux haies de laurier je commets une faute de jeu, une erreur de parcours, comme un enfant qui confondrait gauche et droite, mais les amis et les juniors le savent, et ça ne s’arrange pas d’année en année : je suis un dyslexique du cheminement, un dysorthographique du souvenir, je fais des fautes de mémoire, toujours.
« Soudain« , ça mérite qu’on utilise le mot, elle est là, tout près, à l’autre angle. La maison.
Je suis resté ligoté par mes propres angoisses ou orgueils, et je n’ai jamais pris la peine de regarder mieux. De sorte qu’un court tronçon de rue, vraiment très court mais bien réel, une espèce de petit pan de mur jaune, dans la rue, m’avait échappé. De quoi passer de l’autre côté ?
Et voila. MAISON.

L’origine de ma route, mais aussi l’arrivée de tout chemin, halte au moins refuge,
Si je persévérais dans l’allusion transparente : « Ce fut comme une apparition », hexamètre célèbre. Au coin de l’angle (concept piquant), au long du musée :

LA de BASSANI, LA –oui- MAISON. Avec ou sans jardin, mais, my God, the Bassani’s house.
Le musée pour rien et comme pour rire, visité pourtant deux fois en deux passages, a masqué de son évidence vide la maison de Giorgio Bassani. L’attrait pour les traces de l’Histoire a détourné le chemin des histoires, Bassani, maison, Ferrare, ici, là, moi, maison. La ruée du plaisir provoque l’altération du langage, c’est connu, Encore !
Implacable et nette. C’est LA. C’était ICI. ici, le terme.
Les amis psy prétendraient que je me suis plutôt refusé à la voir.

Maison.

Bassani.

Jardin.

Moi. Refusé à la voir, déni, afin de prolonger encore un peu le temps de l’escalier, le plaisir de l’escalier, encore une minute monsieur le bourreau.

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Didier Jouault pour YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 75/99, Chapitre 24 – milieu. Quand le patient parle, je n’écoute pas les mots. (1) : introduite à temps, l’image à connotation érotique … A suivre; épisode 76, fin du chapitre 24, programmé le 13 AVRIL, date anniversaire de la mort de GIORGIO BASSANI en 2000.

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YDIT-TROIS, comme annoncé, d’abord « PREVIOUSLY » 13 : de nouveau et pour la dernière fois, la première saison, celle des « Séquences Publiques d’Oubli », car les divers projets sont emmêlés en échos, Oublis 96/123 : Dans l’attrait de la nuit prend toujours racine la fleur de la terreur. Publication initiale le 19 avril 2019. Pas si ancien.

« Encore un jour qui commence mal », dit un homme dans le public, clairsemé ( mais si on sème davantage, les tiges étouffent en grimpant).

« C’est l’homme, qui semble clairsemé ? » s’interroge la suave Slave, jamais en reste d’une mécompréhension très volontaire, d’une méconnaissance à pointe, puisque c’est ainsi que les hommes vivent.

Ydit raconte ( c’est- on l’aura noté- ce qu’il préfère).

livres afrique

Il avait été nommé depuis peu dans le département. On avait organisé une « tournée » de rencontres. Ce soir, dans un chef-lieu de canton, il avait dîné avec une dizaine de personnages locaux.

Ils  accueillaient l’arrivant avec les habituelles demandes, et l’offre d’histoires locales : ici, disaient-ils, vieille prune en main…

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…vers les marais noueux ou les chemins de liège, sorcières et rebouteux  savaient les mots de l’indicible. Mais nous sommes des gens simples, et amants de la Lumière, rien de grave.

« Il est tard, vous savez, on n’est pas à Paris, on se couche tôt chez nous ».

Avant le creux blanc du sommeil, toujours lent à conquérir, les autres étaient partis, laissant Ydit payer seul sa dette à l’insomnie.

A chaque fois, trop tôt, pour l’hôtel.

-« Inutile de sonner, il y a un code », disait la patronne. Elle ajoutait : « Vous ne trouverez rien d’ouvert, à cette heure, en ville, ni personne, pas même une dame sur un boulevard,  mais il n’y a pas de risque, on est tranquilles, dans nos pays, s’il y avait des voleurs, ils se coucheraient tôt. »

     Devant l’hôtel, la voiture noire du service. Natif d’ici, le chauffeur est au lit en compagnie depuis longtemps. C’est l’heure de ne pas rouler.

Ydit raconte : Si l’on déambulait, on passait la place de la République, ancienne place d’armes, puis on tournait vers la belle médiathèque installée dans le marché aux grains. Alors, on descendait par la rue du prieuré, forte pente au flanc de l’ancien oppidum. sur le parvis

briques mur crevasses

Elle  passait devant les deux hôtels particuliers Renaissance réunis par une passerelle de métal blanc, et le bloc durable fait par la vieille salle de réunion où les nazis avaient installé leurs maléfices en 40, face à la maison close.

YDIT :Vite, sans presser le pas, on arrivait en limite de la ville, après le garage Renault et ses grilles peintes en noir. Puis, le sombre silence des prés cachés derrière leurs barbelés. Plus rien, ensuite, sous la nuit de lune mouillée. La question, unique, toujours la même : à quel endroit poser le demi-tour? Ici à gauche, le goudron se fait chemin. Quelques derniers pas, le pied touche la terre, la chair quitte les os, on devient sa propre histoire dans l’immatériel du parcours.

« J’irai jusqu’à cette cahute effondrée. »

andré juillard

Depuis le  creux de la pénombre, dans le coeur des ténèbres, une voix l’interrogeait soudain sans brusquerie, lourde et lente, faite d’humeur simple et de bois chaud :

« -Est-ce que vous m’aimez ? »

Ydit raconte qu’il a coupé le fil de la marche.

« Dans l’attrait de ma nuit prend toujours racine la fleur de la terreur. » 

     La femme – mais la voix disait mal son genre- le presse de ne pas entrer : qu’il reste en lisière de la lune sur le chemin de terre battue. Autour, il y a cette odeur que les vaches donnent à la terre grasse d’ici quand elles ne dorment pas, elles non plus.

chouette effraie 2

La voix, depuis son fond de nuit, à son tour raconte. Mais que Ydit, d’abord, veuille s’asseoir sur la souche encore vivante sous sa forme d’orange cou coupé. Qu’il ouvre les nœuds de la cravate de laine, de vent, de chanvre.

Rien ne se passe.

Pourquoi ce silence ?

     Ydit raconte qu’il était impossible d’apercevoir qui parlait sous le toit percé de l’abri. Elle disait : « Je ne mens pas, jamais, sauf à moi-même parfois, si la parole est difficile. Je voyage, on vous l’a dit, que je voyage ? Je bouscule les distances dans le corps d’un effraie, l’oiseau des sagesses anciennes, l’émergeant des lumières d’outre-lieu  dans la nuit des hommes .

    Je suis  le coeur de son  corps en plumets, je vis de mouvements dans l’air, je sais aussi entrer dans l’esprit d’une plante et la déterrer vers sa lumière qu’elle ignore encore. C’est ainsi, mais enlevez votre veston de promeneur innocent, voila pourquoi je peux vous dire  comment un chardon nous écoute, et comment une valériane nous entend, vous et nous, les humains, comment elles jugent nos sarcasmes, nos cruautés. »

     Ydit avait retiré la veste. La chaleur des repas lourds du soir. On ne voyait plus que cet anonymat nocturne des visages qui marque l’insouciance du réel. Des oiseaux épais se posaient sur un pieu, une échelle mystérieuse.

     « Si vous désirez – mais je sais que vous désirez la chaleur, comme tous les hommes, sans connaître les buches ni le feu, alors vous devez sentir le meuble de ma terre sous votre peau… »

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     Ydit raconte qu’il délaçait les chaussures, approchait pieds nus. La respiration des vaches s’essoufflait derrière la sienne, profonde. La voix lui conseillait de ne plus avancer, il ne verrait de toute façon rien de l’invisible, sauf les masques menteurs des discours P1200825  plâtrés, tenus en laisse par des comparses.

Elle se tait. Ydit s’allonge. Elle dit :

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Branly , Sudamérique -costume rituel

« C’est que je suis une sorcière blanche. Ce que je sais faire le mieux…J’ai embrassé l’aube d’été, moi aussi. Elle souffle fort. Ecoutez ce que je fais très bien pour les gens d’ici, c’est cela qu’attendent les parents, c’est m’asseoir auprès de ceux qui vont mourir et me saluent. Comme vous, ils sont allongés, ils sont en cours d’achèvement, pieds nus, leur paletot lui aussi devient idéal, ils vont nous quitter. »

« Ceux qui planent encore entre deux vies, comme les oiseaux, qu’ils hésitent à devenir, enfants et malades perdus par le temps de vivre, alors je m’asseois.

Auprès d’eux je m’assois. »

« Je les écoute, je couds mes plumes d’effraie à la peau de leurs trophées, j’écoute lentement comme ils respirent, au milieu des machines sauvages  qui les enchainent à la vie de l’hôpital, à l’illusion que tout corps est durable,

et je suis là, griffes paisibles posées à la tête du lit, regard blanc ouvert, seule dressée dans la vacuité de la nuit des hommes,

je reste là, personne dans la ville sauf les oiseaux, et moi, mon plumage couvre le mourant et son coma de sa fausse présence, je veille sur  les hésitations informelles de la forme interrogeant sa propre destinée, pas besoin de les toucher, pas besoin de bouger ni planer, je ne leur parle pas, ou presque jamais,

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je suis un oiseau qui sait parler mais veut se taire, je leur adresse la parole, ainsi pour vous ce soir, si je perçois que la ligne de  crête d’un coma va les pousser dans l’obscur de l’autre monde, mais je suis une sorcière blanche, une sorcière des lumières,

moi,

je les retiens alors avec des paroles d’oiseau, des paroles d’effraie, afin qu’ils ne quittent pas le bord de la vie blanche pourquoi

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je veille, longue veille, pourquoi cette veille,

et je les accompagne, peu à peu, dans leur  douleur de vivre et leur inquiétude du passage, dans l’instant que pose la durée de la nuit,

dans la faille,

entre être et partir, et les voici peu à peu qui retournent leur regard moribond vers les pâleurs tièdes et mousseuses de la vie…

Le jour se lève, il est temps de vivre. Les mains de la vie respirent comme des passereaux sans poids que le vent abat sur les champs à la place des glaneuses, mais ils ne perdent jamais le sens du vol.

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                                      Chaque désir à son tour regagne la cage ouverte, et je me dépouille

de mon néant.

Alors, au matin sonné, je quitte leur nuit, je quitte la chambre d’hôpital. Dans quelques minutes l’infirmière de garde arrivera,

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elle dira la stupéfaction de la rémission, elle appellera l’interne mal réveillé : l’improbable bascule qu’improvisent les vivants qui ont été poussés à vibrer encore un peu selon les flux du sang, et s’arriment une fois de plus aux berges de la lumière. »

Longtemps, le silence occupe l’espace. On sent la veille des vaches, autour, et leur immense sérénité.

Des lueurs apparaissent vers l’horizon

 » Toujours je suis là, si les parents ou ceux qui aiment ont fait appel à moi comme ils savent ici, sans crainte et sans douter du réel secret de ma voix, alors, ceux qui naviguaient leur nuit dans l’incertain du coma se laissent conduire par moi du côté de la vie.

     Je suis une sorcière blanche, c’est l’aube, ils vivent, je pars, je me cache, on ne me voit pas dans l’étonnement de la chambre, je pousse mon corps de plumes et de paroles à s’embarquer en silence dans le corps des plantes, dans la silhouette vague d’une promeneuse, et je disparais, à nouveau. »

     Ydit raconte qu’il s’éveille sans lourdeur et sans faute. Il fait froid, il avait trop bu de cette vieille goutte, il a dû dormir, il a rêvé sans doute. Des livres anciens seront venus se réciter eux-mêmes dans l’éperdu de la mémoire où l’explosion des ombres veille en sourdine.

     Les plis du réel coupent le paysage de ses souvenirs, comme les plis de la chair façonnent les parcours émouvants sur le corps – surtout les vieux corps- dont les visages creusés disent les cheminements intimes, leurs désirs, nos repentirs.

     Dans le bosquet ouvert à la mémoire, la sorcière sait-elle où se trouve la clé du blanc et du noir?

Voltaire le sait, il sait tout : « Plus un mot est léger, plus il est clair, et ce qui est grave est clair ». IL demande à Ydit s’il  se souvient de tous les livres ?

Ydit répond qu’il a oublié ce qu’il a lu, ce qu’il a bu aussi, mais qu’il se souvient de tout ce qu’il a rêvé, ce qu’il a défait.

Germaine dit que « sa mère étant à l’hôpital, elle avait aussi invité une sorcière blanche, connue sur les quais. Rien de plus, rien de moins. Mais les trains savent partir à l’heure de l’attente, même quand les rails n’ont pas été passés à la paille de fer du langage. »

Vassiliki hésite, elle se passerait bien de parler ; mais comment échapper à l’indissociable du trio : « Le récit de la sorcière ce n’est qu’invention de la mémoire fatiguée, dit-elle.Puis ajoute qu‘elle a connu des lieux où l’on enrichit à la main la mémoire des coupables. »

Quant à lui, Ydit se souvient  de son AUBE : « Au réveil, il était midi ».


Didier Jouault, pour Yditblog, Séquence Publique d’OubliEs numéro 96/123

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Comme annoncé – mais se rétrécit le temps de l’attente-YDIT-TROIS, comme annoncé, d’abord « PREVIOUSLY » 12 : la désormais deuxième saison, celle des voyages en villes italiennes du nord, et le si long arrêt sur images de FERRARA, l’éblouissement des ruelles et de l’Histoire, les mages et Silvia -l’absente hôtesse, de qui naquirent les pages puis les posts du « Jardin de Giorgio Bassani ». Voici donc la…rediffusion telle quelle de la séquence 80/99, datée du 28 avril 2021, publiée sous le titre ( rien moins ! ) : »Je me sens guilleret du vocabulaire ce matin »- segment initial du chapitre 26 qui en comportait 3.

Chapitre 26

SILVIA prépare le café pour son visiteur-dîneur.

Le matin, c’est toujours la brume. Ferrare, sous les vagues mousseuses du soleil cache des moisissures que l’ombre secrète. Ici, en été, il n’y a pas de matin, sauf à cinq heures. Le soir, qui dure longtemps, c’est la sécheresse, les vapeurs s’en sont allées, les sueurs des touristes sont évaporées, comme si les pierres où se posent tant de shorts, de mains et d’attentes se transformaient en éponges un peu goulues.
A Paris, l’âge venant, je vois les autres, je tente toujours de leur parler dans l’intérieur de leur rythme, à la parisienne, de répondre vite et de penser drôle. Mais je ralentis parfois et ils me regardent (m’observent) gentiment, comme un qui serait lendemain de fête, « Il commence à fatiguer le vieux, t’as vu? » ( Juniors disent)
A Ferrare, on ne me compare pas encore à ce que je fus, dans le soleil qui ne les ménage, les touristes vibrillonnent et fugacement échangent du vide.
L’incertitude permanente préserve les Ferrarais. Ferrare, c’est Giorgio, et aussi un peu maintenant Silvia, la présente fuyante, l’inconnue visible, la fille du balcon sur son jardin rose griffonnée par les incertitudes visuelles du réveil

après peu de sommeil… De toute façon, écrivait le bon vieil Emmanuel Kant, si tu connais pas l’autre, tu connaîtras encore moins ta propre conscience, donc démène-toi, laisse tomber l’urgence, regarde juste le film intérieur. Ou était-ce Rank ?
Je tarde longtemps à quitter l’abri paisible du jardin rose, son café fort. Pas de Théralène hier, ou de Circadin- plus cher mais en vente libre-pas besoin, malgré le trop de vin et de mots. Évidemment.
Je marche dans la ville en mettant mes pied sur les traces de NERO, reproduisant comme je peux les parcours assez chaotiques de la soirée « Ferrare et ses mystères » avant-hier : toujours tracer deux fois le même parcours, afin de commencer à creuser la trace, même s’il faut du temps, pour laisser l’empreinte. TRACE, j’aime ce mot de skieur en Norvège, de chamelier au Harrar. « Qui laisse une trace laisse une plaie » disait l’Henri explorateur de gouffres et il se gourait, fillette qu’est-ce que tu te goures : qui forme une trace laisse un avenir.

Je me sens guilleret du vocabulaire, ce matin. Évidemment.
Mon séjour ici touche à son terme, et à la cible. Je recolle les images sur le cahier des errances. Je collectionne les fragments de mémoire et raboute le puzzle, je sais que la via Vittoria sera la deuxième à gauche à partir de maintenant. Plaisir profond désormais acquis d’une familiarité banale, les vélos restent l’un des principaux risques de Ferrare, on ne peut pas marcher le yeux fermés, surtout si on regarde les shorts en avançant. Dans ce jour lent, j’ai le sentiment que tout se décline par deux. Reste de vin au Vieux Ghetto ?

Vélos : Bassani fait allusion aux rails d’un tramway obsolète, déposés dans l’au-delà des remparts et, à l’époque, déjà rouillés, de sorte que la bicyclette n’a plus de prédateur connu, dans cette ville, hormis la fatigue musculaire – cuisses, fesses, cœur, abdominaux.
Lorsqu’on ne peut plus marcher, le départ s’impose.
A une terrasse, je déplie les mels. Cécile, Mark, Sergi, bien sûr Edith et les filles. A l’agence, Les Juniors, mes notes si peu mises en forme et les fragments successifs du délire les amusent et les irritent. Il paraît qu’on dit de moi : « Il fait son Tintin de Ferrare ! », Roman de Ferrare, balade à Ferrare, promenade au phare, tout ce temps pour en parvenir là, et d’ailleurs « To the Ligthouse », Virginia Woolf, comment traduire ça précisément, avec la légèreté du mot et l’implacable indestructibilité – telle quelle – de ce « to« , ici une seule complice peut ajouter de la précision, la jeunette de notre bande usée, restée la meilleure de l’Agence,

Cécile : « To the Lighthouse » fut traduit en français par « La Promenade au phare« . Le mouvement du to, se retrouvant dans le mot promenade. Mais peut-on appeler la traversée de la mer vers le phare promenade ? Une promenade de ne fait-elle pas plutôt sur la terre ferme? Plus tard, d’autres titres s’ajoutèrent. Voyage au phare. Vers le phare. Au phare. Échouant un peu tous devant l’évidence du to. (…)Al faro, en italien Toujours trop court. En italien, le titre de la première traduction était Gita al faro. Gita, excursion. Le sens est là, le nombre de syllabes aussi, et pourtant quelque chose ne va pas »

( Cécile WAJSBROT, « Nevermore », Le bruit du temps, 2021)

Donc  » to », et au fond seulement ce « TO » là, voilà ce que je fais ici. Un type, près de soixante-dix ans, nostalgique et un peu amusé, traîne ses ombres dans les espaces du souvenir comme à cheval sur les périodes, les villes, sa bicyclette, tout le bazar des fantômes déguisés en filles.


Comme on accepte des mignardises avec le café en dépit d’un dîner opulent, je visite la Maison Romae. Trois couples séparés, tous Français, seuls visiteurs, deux messieurs portent chapeau de paille ( d’Italie !) parlent fort de leur culture, si aimable, si arc-en-ciel. Sur les murs, la belle histoire des amants surpris et décapités mais c’est assez de récits dans le récit pour cette fois.

Retour –inhabituel- (tiens-tiens ?) pour déjeuner sur la table ronde du jardin rose, mais pas de trace de Silvia, bien sûr, et je suis dans mon jardin, qui est à peine le sien, protégé du solide portail, au milieu du quartier, au milieu des marques de l’ancien Castrum romain dont les lignes se dessinent encore nettement sur les vues de GoogleEarth, au milieu des anciens doubles bras du fleuve Pô qui faisaient de Ferrare une île avant qu’on déplace son cours, au milieu de La Mura.

A l’époque où des jeunes filles juives s’amusaient à flotter sur leur rêve.

Mon enfermement est mon apaisement, comme au centre invisible d’une cible. Ne plus bouger ? Mais pourquoi être ailleurs?


Je n’attends pas la logeuse

qui n’arrive pas. Dans la rue, au sol, des cartes.

Dernière sortie avant le péage ? Je passe une fois encore, (la dernière ?) rue Mazzini. Une camionnette, probablement d’artisan, est rangée tout près de la porte de la synagogue. Trois hommes dialoguent (tant pis pour l’étymologie !), le torse de l’un – genre entrepreneur parvenu –(il porte une sacoche Vuitton et des Rayban) est plus qu’à demi engagé dans le portail semi-ouvert sur une pénombre légère. (A FERRARE, souvent, tout est moitié de) Je m’approche, la mine la plus paisible et intéressée qu’on peut. Demande si : c’est ouvert ? Il interrompt son appel au smartphone : nettement, non. Il me sourit comme ferait la vieille gardienne du cimetière hébraïque :  » pas de kippa ? » . Ému par le ratage que je pressens j’insiste. On voit qu’il peut s’irriter, décider de ne pas comprendre, faire mine de s’indigner, d’appeler les carabinieri, le rabbin, les Francs-Maçons de Ferrare, les fantômes des fascistes, d’arrêter des vélos,

incident suprême, caillots, anévrisme, tout défile, mort subite. Pour longtemps( et ma vie est désormais brève) la synagogue, en travaux depuis sept ans, sera close à l’incroyant que je suis. Lors du précédent séjour à Ferrare, le cimetière juif s’était refusé, et pourtant cette fois j’y ai passé deux heures. Espérons, espérons, espérons,

même si on commence par gémir.


Faudra-t-il que je revienne dans sept ans pour que la porte s’entrouvre ?
Parcours de NERO : je retrouve sans hésiter la haute et très abandonnée façade de ce qui fut « la synagogue espagnole», plus ancienne, mieux oubliée, ou plutôt, mieux déniée dans son identité. Là encore, étroitesse de la rue, et recul difficile. Mais vous connaissez bien cette plaque, je la répète pour qu’elle ne s’oublie pas. . On perçoit toutefois les fenêtres à jalousie, exceptionnelles car elle signalaient trop l’Espagne, le Juif donc, et on n’a osé en construire qu’après la première génération des arrivants de la Péninsule, quand il semblait (mais il a si souvent semblé puis si souvent déçu) qu’enfin en ce duché d’Este on pouvait commencer à planter des arbres à croissance lente, à l’intérieur, dans le patio maintenant inaccessible pour que les générations et les générations s’y protègent de l’ombre. Plaque usée ; toute en majuscules d’un graveur peu adroit mais attentif.
IL 2O NOV 1492 IL DUCA ERCOLE I DESTE PROTESO A TRANSFORMARE….PRIMA CITTA MODERNA EUROPEA INVITO GLI EBREI ESULI DALLA SPAGNA A TROVARE IN FERRARA UNA NUOVA OSPITALE PATRIA …LA SPLENDIDA SINAGOGA SPAGNOLA DISTRUTTA NAL 1944 PAR MANO DEI NAZIFASCISTI. 20 NOV 1992, par communauté juive de Ferrare.

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Didier Jouault pour : YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 80/99, Chapitre 26 – début. Je me sens guilleret du vocabulaire, ce matin ! Suite le 30 avril…sauf erreur ?

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YDIT-TROIS, comme annoncé, d’abord « PREVIOUSLY » 11 : la désormais deuxième saison, celle des voyages en villes italiennes du nord, et le si long arrêt sur images de FERRARA, l’éblouissement des ruelles et de l’Histoire, les mages et Silvia -l’absente hôtesse, de qui naquirent les pages puis les posts du « Jardin de Giorgio Bassani ». Voici donc la…rediffusion telle quelle de la séquence datée du 24 janvier 2021 ( ça se rapproche, le récif du récit, le toujours implacable naufrage du narratif => « YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 58/99, Chapitre 19 – milieu. Comme un cercle au milieu d’un carré.

(Nota bene : ce « post » a fait partir d’un groupe de trois)

Dans les différents espaces du vaste « Cimitero Ebraico« , dont la vieille femme enfin m’a donné l’entrée, je marche au milieu de pyramides…

Ensuite, contournant une ligne de troncs anciens, survient une autre parcelle, plus petite, très occupée de tombes à formes diverses, cette fois, et lire les noms redevient possible. On aimerait que la gardienne réponde : chaque espace est-il dédié à l’une des «  synagogues », mentionnées en fonction des origines, l’Espagnole, l’Allemande ? A des époques diverses ? A des riches, des pauvres ?
Trois ou quatre parcelles, saturées ou vides, et l’on sent qu’on se nourrit de temps, justement parce qu’il est ici arrêté. A l’époque romantique, mais cela aurait été privé de sens, un poète fatigué aurait été représenté, en position du penseur, au bord d’une tombe, par un peintre délavé de soleil. 
Encore par surprise, apparaît soudain la tombe de Giorgio Bassani, isolée, séparée de l’entrée, mais comprise toutefois dans l’unité gravement sereine du lieu. Plus proche d’un mur séparant deux enclos, assombrie par des buissons ou des arbustes, la dalle horizontale est couverte de ces petites pierres qui marquent le souvenir et qu’on dépose après le kaddish. Perpendiculaire au sol, un bloc épais, massif, en métal, aux bords irréguliers bien que semblant un rectangle debout. Il porte un petit nombre de signes que je ne sais pas lire. Pas moins irréligieux que toujours, j’entends pourtant sourdre la voix psalmodiant la prière. Autour, on ressent l’oubli de beaucoup dont les noms s’effacent, et la piètre mégalomanie d’autres dont les sépultures sont d’inquiétants bâtiments douloureusement décorés pour l’absence de visites.
La tombe de Bassani est solitaire et dessine avec ce qui l’entoure comme un cercle au milieu d’un carré. Vingt mètres plus loin, disposées comme on s’y attend, beaucoup de tombes «  italiennes ». Je cherche des Finzi, des Contini, des Bassani. Parmi bien d’autres, fixées dans l’ombre-soleil d’un mur et protégées de vigne vierge, deux stèles verticales, anciennes, DEL RAG DARIO FINZI voisine avec MALVINA FINZI Ferr 2 ott 1842 Trieste 13 lug 1936.

Beaucoup de CONTINI. Au milieu de l’un des enclos, deux stèles verticales juxtaposées : ANGELO ENRICO BASSANI/ MEDIC CHIRURGICI 1885-1948 et DORA MINEBI/VED BASSANI 15.10.1893 -11.5.1987, les parents.
Je me souviens aussi du grand-père maternel, celui qui dirigeait l’hôpital de Ferrare, beau vieillard à cheveux emmêlés sur la photo, et je cherche en vain la sépulture. Casaere MINERTI.
Il y a toujours un absent à l’appel des morts, comme dirait Géo Josz, le héros de cette nouvelle de Bassani, où il revient d’entre les morts des camps. Je vous raconterai ça.
On envoie des photos en pièces jointes à Mark, Sergi, Cécile. Ils attendent pour répondre, à raison.
Dans un autre coin du cimetière composite, au terme d’une allée plus large, presque sombre car les arbres sont élevés, un édifice de pierre et de verre, on dirait XIXème, attire les pas.Le salon funéraire a été construit comme toute une partie ancienne du cimetière : en grand format, et en matériau de prix. La double porte coulissante est close, mais mal. Poussant sur le métal lourd (les rails au sol n’ont pas servi depuis longtemps ), on parvient à dégager l’interstice d’un passage.
L’intérieur, plutôt vétuste, garde son frais et sa dignité sous les traces de salpêtre. Au centre de l’athanie, le coutumier bloc de marbre, au format d’un carré long, une plaque épaisse, plus large en bas qu’en haut, noire. Au mur, en hauteur, séparées de deux ou trois mètres, dominant la table, des plaques rectangulaires sombres, très allongées, la première est illisible et je n’ose m’approcher, mais à déchiffrer les deux suivantes ( ou les deux premières si on lit, logiquement, de droite à gauche ?) on devine : DIO DA MORTE E VIVA / POLVERE SEI E POLVERE TORNERAI.
Pour Giorgio Bassani, la Hevra Kaddisha de Ferrare a-t-elle respecté le rituel dans sa rigueur, presque son archaïsme, offert au défunt la Tahara purificatrice par le bain rituel, et déposé au milieu de la table son dernier corps connu? Son fils aurait-il été le seul à pouvoir le toucher après sa mort pour fermer la bouche et les yeux, autrement dit, en obéissant à la tradition religieuse, accomplir ces gestes que Bassani refusa : fermer le regard et la parole sur la vérité d’une certaine Italie fasciste ?


Le corps a-t-il été, après qu’on l’eut déshabillé – uniquement recouvert du blanc linceul prescrit, mains ouvertes, paumes vers l’Eternel, bras étendus alors que souvent les chrétiens croisent les mains sur le ventre des morts? Puis posé au fond du cercueil sur une couche épaisse de paille, pour favoriser les ultimes recueillements, sans avoir passé par la synagogue  depuis la mort ?

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Didier jouault pour : YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 58/99, Chapitre 19 – milieu. Comme un cercle au milieu d’un carré. A suivre …

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