YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode SEPT : premières fois que, journée en excursion à Fontainebleau.

INCIPIT 5 : On aurait pu commencer ainsi : « -…je sais, j’ai compris, je n’aurais pas dû… (David DIOP,  » Frères d’âme », (Editions du Seuil 2018)
Mais on a choisi ça :

Note de Mme Frédérique :

Ce feuillet, comme d’autres parfois, laisse à penser- surtout par l’usage des temps-, qu’en matière de rédaction mon ex-directeur, Y.d’I. ne formait pas encore l’image (ou le projet ?) de sa propre disparition, cette «  disparition » encore inexpliquée, mais qui le conduisit par anticipation sans doute à regrouper tous les textes ( Tous ? A vrai dire, je n’en sais rien) dans cette  épaisse enveloppe et cette clé USB qu’il m’a fait parvenir sous le titre «  Lettre de A., Version B » . J’ajoute que les allusions intimes, à chaque fois, produisent en moi une gène certaine, en dépit de ce que lui et moi ensemble avons connu.

Texte de YDIT : « Lettre de A. », version B : PREMIERE FOIS ?

Septante et davantage étant venus, on pourrait se précipiter soudain, exister comme si la hâte était une façon de vivre, se presser de se presser parce qu’on ne le sera bientôt plus. Mais non, non : voici que Septante et davantage étant venus, le temps ne se rétrécit plus à l’attente d’une action proche, espérée ou redoutée. Il se dilate à la dimension infinie, celle de l’absence d’attente.

Sauf exclusivement pour La Chasse au Parrain, à présent. Car voici que si tard- Septante et davantage étant venus- une autre raison de courir est survenue.

Ce qui se passera, pour soi-même désormais (pour l’univers, on ne sait) : heureuses répétitions, plaisants bonheurs, agréables redites, ennuyeuses traverses, détestables faiblesses, l’agréable vie : repas de famille, amitiés autour d’une table, livres découverts, voyages et villages, rivages et visages, maux de corps et d’humeur : les formes et détails changent, mais le fond reste tel qu’en lui-même la répétition le fige. Le floute. Le frippe. Le veloute. Septante et plus étant venus : la vie habillée de velours.

Aussi, on prend son temps de baguenauder dans la mémoire tel un chaland dont le panier déjà serait plein. Ydit ne saurait plus décrire la première image d’un pendu : image d’un pseudo Villon sur la couverture d’un livre de poche ?

Gravure illustrant un édition d’Histoire sur la Guerre de cent ans ? Documentaire ancien sur les conclusions du procès de Nuremberg ? Peut-être même ( hypothèse la pire)  le très ancien film de ce Polonais dont le nom échappe, et qui -sous le corps-, montrait ce que l’abdomen expulse de lui-même à cet instant final et sale ?

Pour l’autre personnage mâle central dans  son récit (on lira que les femmes y ont la part majeure) , Ydit cherche une Première Fois dont Marcel Malbée, dit M.M., Le Parrain, Die Pate serait l’acteur principal. Et il ne parvient à rien. La mémoire se mord les doigts de ne même pas savoir mentir assez. Cependant- on le sait, des livres le racontent- nous avons tous des forêts d’images des « premières fois », bulles aux couleurs aigues de rouge et de vert sur décor d’ombres pâles. L’image- dit-on – s’impose en flétrissure nécessaire sur la chair molle de la mémoire.

Mais non, pas pour celui-là : Marcel Malbée,  dit MM, Le Parrain, Die Pate, semble surgi d’un milieu qui n’aurait pas de début. Nulle « Première Fois ». En tout cas, pour cela qui importe, et qu’il disait en préambule :

« Tu n’as vraiment pas trop chaud, avec ton joli pyjama, YDIT le Didi ? »

En d’autres temps (de vie, de littérature), YDIT aurait ici commencé ce qui a été un sous- genre littéraire : l’affectueuse liste, celle des premières fois, par exemple, d’un livre, ou celle des bouteilles de vin blanc ou des cigarettes consommées/consumées pour écrire ce gros livre sur l’emploi de la vie, ou des poireaux et pommes de terres indispensables à la confection du dîner de Neauphle-le-Château.

Ou encore- la tentation perdure, en forme de tendre mais ironique hommage-, une liste n’indiquant nul message sauf elle -même.  Ainsi : au cours du trajet entre Montparnasse et chez lui, toujours, Ydit s’arrête pour explorer les bacs de livres soldés sur le trottoir de ce magasin spécialisé. Sur la table à lire, le dernier volume acheté comme pour rien : « Encore une journée divine ». Personnage qui monologue en courts extraits, séance après séance, répondant aux questions du psychiatre, ainsi devinées en creux (mais jamais formulées, comme si la réponse importait plus que l’interrogation), dans une chambre de clinique. Le narrateur se prétend psychothérapeute lui-même,  écrivain, porté par un immense succès, bien que ses livres – essais surtout – soient désormais introuvables, et en particulier le plus célèbre : « Changer le monde ».  Avec les histoires d’écrivain, on s’y perd.

Une première étiquette-prix, toute petite, sur la couverture, verte, porte : « 4 euros ». Une seconde, rouge, la recouvre en partie : «  1 euro ».

Marcel Malbée, dit M.M., Le Parrain, Die Pate, qui revient sur scène après une très longue éclipse, on n’a en souvenir de lui que des premières fois de seconde main, étiquette rouge sur étiquette verte : solde de solde d’invendu. Invendable, introuvable en magasin, le souvenir du tout début de Marcel Malbée n’a pas de prix stable-ni connu, d’ailleurs. Se peut-il qu’il soit encore vivant ? Vieux, petite retraite, abandonné, triste, malade : suscitant la compassion des voisins? L’intérêt lointain du Bar-Tabac PMU ? l’assistance d’une aide-sociale? Et cependant, objectif, si on le trouve : l’exterminer, avec précision et lenteur, comme on opère la première fois. Cela est le but. Exterminer ce qu’il reste de Marcel Malbée . BOB et MORANE – Ravageurs Détectives sans age – sont l’arme.

La première fois (on avait dix ans ? douze ans ?) où l’on a pénétré chez lui en poussant le lourd velours qui protégeait l’entrée. Aussitôt, en lumière ( était-ce une ridicule statuette portant un piètre abat-jour ?) :  le David de Donatello, sur un gros meuble sombre, une commode où il rangeait entre autres ses pyjamas, ses slips blancs à poche. Bien plus tard, YDIT sut ce que la mauvaise reproduction, en dimensions mesquines, avait à dire d’entrée, ici, dans le petit appartement de célibataire où nulle image féminine n’existait.

Dans un manuel d’art, le critique note au sujet de ce David : « Le jeune homme s’est libéré du poids de l’armure qui l’entravait, et dont il n’a gardé que les jambières.

Sa ‘nudité héroïque’- concept en vogue à l’époque dans les milieux culturels florentins néoplatoniciens – justifiait l’exposition de cette statue dans un lieu public »… Mais au moins, chez Marcel Malbée, dit M.M. dit Le Parrain, – où rien d’héroïque n’existait – jambières ou pas, nudité débarrassée des entraves ( un pyjama taille junior ) il faisait chaud, et les toilettes n’étaient pas sur le palier, comme à l’appartement de la famille elles étaient. Sur le palier, c’est glacé l’hiver. Die Pate, c’était chaud. On n’aurait pas dû s’y intéresser.

La première fois que, on ignore pour quelle célébration ( la communion solennelle sans doute, car c’était Die Pate ), la famille se retrouve avec Marcel Malbée dit M.M. Le Parrain, Die Pate autour d’une table ensoleillée, bistrot de campagne, journée en excursion à Fontainebleau : il y a des fraises chantilly au dessert, pour eux qui manquent d’argent, nous, la famille, c’est un luxe. Même il y a du sucre en poudre vanillé dans un ramequin de métal brillant et propre : on se croirait chez les riches. Le gamin perçoit aussi que la cuisse de Marcel Malbée, contre la sienne, tous deux en short, porte une chaleur insolite.

Mais c’est Le Parrain. Il y a de la crème chantilly, c’est sucre et vanille, une partie de campagne, du Manet en pyjama bleu et jaune rayé, sur la pelouse, du Renoir en excursion de Belle Epoque. Voila, probablement est-ce ainsi que le garçonnet a pensé dans son ignorance primitive le menu évènement : on n’a qu’à dire qu’on est dans une peinture.

Dans le roman « Encore une journée divine », ( une sortie de campagne à Fontainebleau ?), acheté un euro chez BookShop (étiquette seole 1 à 4 euros), aussitôt après les dernières phrases («  Quoi qu’il en soit, j’ai enfin un exemplaire de  « Changer le monde », depuis que j’en parle ! Donnez moi une minute et je vous le trouve », p.188 ), et quelques notes de détournement,  commence le « catalogue » (en date d’impression : mai 2021) de la collection «  NOTAB/LIA », chez Les éditions Noir sur Blanc.

  1. Dernier voyage à Buenos Aires, Louis-Bernard Robitaille
  2. Trois cercueils blancs, Antonio Ungar
  3. Journal d’un recommencement, Sophie Divry
  4. Lutte des classes, Ascanio Celestini

…Surprenantes coïncidences des titres…

Septante et davantage étant venus – on le disait à Cécile (complice en Jardin de Giorgio Bassini,cf. Saison 2)- , entrer dans le long plaisir d’un livre devient  plus rare, car l’exigence a grandi. Aussi, en achetant « Encore une journée divine » ( expression provenue de « Oh les beaux jours » de ce Samuel qui va traverser en filigrane une partie de la « Lettre de A. Version B »), surgit un projet comme on en rêve encore à cet âge ( séduire OUFA de Rabat, Isabelle de Cadet, devenir ami de Michel ou Malik), ces projets n’en sont plus un, ne peuvent plus être des projets, même si toute rencontre hâlée de plaisir est une renonquête sur l’oubli que Septante et davantage sont venus).


Projet, donc : parvenir à réunir l’ensemble des romans de cette  collection parus à la date de publication de «  Encore une journée divine » ( tout comme Gil avait réussi à retrouver les cent premiers numéros du Livre de Poche, avant de n’en garder que les couvertures). Probablement, un bon nombre n’existe plus ailleurs que dans la Réserve de la Bibliothèque Nationale. Fréquenter la Bibliothèque, ne pas bavarder devant le comptoir d’accueil, ne pas sortir boire un café, ne pas entreprendre un échange vain mais joli avec la conservatrice du rayon Tourisme. Lire les 63 romans ( le 64 ème, c’est tout juste fait : « Encore une journée divine »). Ce seraient autant de « Premières Fois » : YDIT n’ a jamais lu aucun des auteurs du catalogue. Belles découvertes ? Pénibles abandons page 47 ?

Pendant ce temps, sur le balcon du voisin, une adolescente à la Maynet gratte sa guitare bavarde comme pour croire à des histoires de trottoir et d’aurevoirs. On peut en rester là. Tranquille. Guitare. Paisible. Liste de romans à lire. Serein. Rencontres à découvrir mieux. On peut. On pourrait. S’installer dans l’immobile silence de l’attente de rien.

Ingénue façon de se préserver, de ne pas s’y mettre, à l’écriture de

La Chasse au Parrain ?

Septante et davantage étant venus, cette sorte de projets amusants et inutiles – comme d’aller au terme d’une liste pourtant non fermée –  marque bien ce qu’il reste à faire, maintenant, c’est-à-dire l’exact contraire : s’occuper de ce creux qui fut creusé jadis par les mots du Parrain. Par ses demandes, ses offrandes, ses voyages et les cordelettes de pyjama. Puis- Tranquille, Paisible, Serein : le dépecer, à mains nues, de préférence.

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Didier JOUAULT, pour YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode HUIT : premières fois que, journée en excursion à Fontainebleau. On peut suivre chaque semaine, almost. Sauf cette fois : congés, tout le monde part, nul ne lit. Donc. Prochain épisode : Mercredi 1er novembre, on aura du temps cet après-midi là. Ou bien, la flèche <== en bas servira pour activer le retour en arrière.

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YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode SIX : noué du col au bout de sa branche.

INCIPIT : On aurait pu commencer ainsi : « Cela faisait quelque temps que nous envisagions de reprendre notre échange autour d’un thème paradoxalement peu abordé dans Une autobiographie allemande, la littérature » (Hélène CIXOUS/ Cécile WAJSBROT , « Lettres dans la forêt », L’extrème Contemporain, 2022)
Mais on a choisi ça :

Note (brève pour une fois ) de Madame Frédérique, ex-assistante, dépositaire du paquet envoyé par un ex-patron nouvellement disparu : « Lettre de A. Version B » :

Y.d’I ( je préserverai son anonymat, ceux qui le connaissent le reconnaissent) précisait, sur un post-it rose un peu décollé, dont le texte semble repris dans le corps de « Lettre de A. » : 

« Rien de tel qu’une parodie affectueuse pour commencer. Pour recommencer, après tous ces temps de silence en ligne. BOB et MORANE. Le VIEUX SAMUEL. N’aurait pas été content, The Old Sam, de ce verbiage caqueté. Tant pis. c’est ainsi. »

TEXTE de YDIT , « LETTRE de A » ,version B.

Rien de tel qu’une parodie affectueuse pour commencer. Pour recommencer, après tous ces temps de silence en ligne. BOB et MORANE. Fin de partie, Septante et davantage étant venus. Bob MORANE, de Henri VERNES, lecture des treize ans, année des premiers titres, sans doute aussi l’époque (finissante bientôt? Le gamin grandissait trop ? La puberté peu à peu épaissit les aplats ?) l’époque ou s’achevait ( enfin ! ) le temps de ce DIE PATE, Marcel Malbée, qu’on s’attend à voir surgir, qu’on s’attend à entendre- mais qui diffère sa différence ?  » Je suis content de te voir« , proférait-il chaque dimanche pour le déjeuner famililal. Te voir, et pas que. Bob MORANE et l’Ombre Jaune, image du mal. BOB et MORANE et DIE PATE, image de quoi ? De l’erreur consentie ? Les Détectives – ravages et le Parrain-sauvage qui font trop bon ménage ?l’horreur de l’erreur : n’avoir pas su dire NON ?

Voici que l’on s’engage donc pour quelques dizaines de milliers de mots, cent quatre-vingt mille minimum  dit le compteur, – sans compter les ajouts inutiles et indispensables- et pour beaucoup de jours de travail, d’écriture, de biffures, d’aventures et d’impasses. Comme toujours et partout depuis le Big Bang, il n’est pas possible de partir de rien ou presque rien. Dans le récit -donc dans votre futur-mais aussi dans le passé dont le récit se constitue, errent  encore des figures ( des troupes ? des tropes ?) et des personnages : simples silhouettes ou très omniprésentes héroïnes; fulgurants héros; passagers figurants qui passent en tenue de Rien et qui marchent de concert dans un décor de vide et de silence. C’est ainsi qu’on écrit le passé.

Ceux  qui furent pendant la saison un ( celle des Séquences Publiques d’Oubli) ou pendant la Saison deux (le labyrinthe de Ferrare depuis la tombe de Giorgio Bassani jusque aux yeux  noirs d’une hôtesse : Silvia),  et tous les comparses d’avant – jamais venus au jour – ceux qui ont été  les parallèles de chemins anciens, elles et ils sont tous là, encore :

personnages qui secouent la nuque et les cuisses, tapent du sabot et dans les mains (chantent-ils en cœur ? ) puis regardent vers les nuages velus et la terre ouverte. Ici, prêts. La vie est une réserve de personnages comme on dit réserve sauvage. Et l’AUTRE, noué du col, sauvage dans le silence.

Le récit d’aujourd’hui c’est comme le visage d’un vieil homme dans le miroir d’une ancienne brasserie au temps où l’on fumait : moi, Y.d’I dit YDIT, mêmes traits, même chair et dans la superposition des peaux s’aperçoit la trace multiple des rencontres, les rides d’expression. Tous les anciens passagers de la vie, de toutes ces vies, Septante et plus étant venus, restent là, restent ensemble, même si l’on n’aperçoit plus désormais que les ultimes acteurs. Dans cette (cette fois impudique) mise en scène de moi (Y.d’I.) le plateau qu’on traverse entre Cour et Jardin compte moins que les machinistes en coulisse, les maquilleuses en loge, les spectateurs du balcon, les filles en short qui passent dans la rue, dehors, la rue, dehors, toujours. La mémoire est usée comme une vieille souffleuse de comédie.

Toutes et tous sont là, secouant nuque et cuisses, pour la danse tribale convoquant les Grands Esprits. On les voit qui tapent des pieds, chantent en chœur, puis tournent leurs yeux vers les nuages fertiles d’où tombe l’averse du souvenir. Pas orageuse, pas larmoyante.

Prêtes et prêts ? Prêts et prêtes ! Roman ! Images !

Apprendre, par exemple, pour Hanged James, rigide et pâle dans sa fenêtre, noué du col au bout de sa branche,  savoir ( pas imaginer, non, savoir ) ce que son DIE PATE à lui avait pu imposer à son corps, à ses gestes, à sa faiblesse, à ses yeux, à sa tendresse, souvent ou pas, en douceur ou pas, dans la caresse du lit ou la brutalité de l’escalier, avec bassesse ou malice, avec la bouche ou les mains et quoi de pire, en jouant l’amour peut-être ? SAVOIR pour cet autre, Hanged James (on va le présenter ensuite), à quoi son vieux DIE PATE jouait avec ce jeune corps, en disant seulement la cynique force du sexe sans doute, SAVOIR ce qu’on avait osé imposer à celui-là, James pas encore Hanged,  qui- vingt ans après- n’en pouvant plus d’avoir été cela, et seulement cela, ce corps exploité, ce territoire de silence, cette tanière de conscience victime et coupable, -car lui non plus n’avait pas fui ou dénoncé, n’avait pas su dire « NON » dès le premier geste – lui qui avait fini- douleur et culpabilité- par se pencher si fort au bout de sa branche qu’il en était tombé pendu ? SAVOIR, comment avait été sa terre de détresse?

Alors que, – telle est la stupeur Septante et davantage étant venus- à une autre époque, mais c’est la même au fond, l’époque de la complicité en silence, YDIT, lui, dans la proximité nocive mais jouisseuse de Marcel Malbée dit M. M. dit Der Pate, lisant Bob Morane,  recevait d’identiques demandes, voyait avec les mêmes yeux les mêmes gestes ou presque, devinait que la cordelette du pyjama de gamin serait dénouée par la main du vieux, comme une sale histoire,  parce qu’on a trop chaud, non? Bleu et blanc, rouge et vert, le pyjama (certes pas de lin blanc  ça coûte trop cher, on n’avait pas d’argent, nous, seulement Die Pate, un peu davantage, voiture, couscous chez le Marocain)

« Tu n’as pas trop chaud avec ton joli pyjama, Ydit ? »

Alors que YDIT avait appris avec surprise et connaissait sans étonnement les possibilités de ces deux corps, le corps jeune, le vieux corps, des parcelles de corps plutôt, bien précises, trop précises, ici commence et cesse vite le corps intéressant, et que selon toute probabilité cela ressemblait aux postures et glissements d’épidermes ou de salives entre James pas encore Hanged et son vieux DIE PATE à lui…

Et pourtant, telle est la stupeur Septante et davantage étant venus, l’un- James – traverse les épisodes parfois joyeux de la vie, sans jamais renoncer au terreau invalidant de la souffrance mémorielle, au point d’être Hanged un petit matin, au bout de la branche, pendu... Et pourtant l’autre -YDIT le Didi-  parcourt la vie comme si la mémoire avait subi l’extinction d’une race : les souvenirs, et caracole dans le bois pour le footing quotidien, et vole en avion vers des villes jolies, ou des amis, pour visiter des musées ou des gens, prononcer des mots en public, partager des bonheurs en intime, regarder les filles en privé.

La différence de James et YDIT, le pendu et le rieur, ( on dirait une fable ), comment la comprendre ? L’injustice, comment l’accepter ? La distance, comment l’effacer ? Pourquoi le sourire crispé au bout de la corde et de la nuit pour l’un, et pour l’autre le chantonnement guilleret des jours sans crépuscule ?

En parler, encore parler de Marcel Malbée, dit MM, dit Le Parrain, grand amateur de pyjamas pour garçonnets, au point de collectionner les catalogues de « La Redoute » ?

Reste l’explication de ceci trouvée si tôt : l’écriture.

Comme un marais, un désert, une jungle, une caverne, une ruine, une Amazone : de quoi traverser ! Ecrire est ce qui permet de traverser. Aussi : l’écriture comme un balais de chantier poussant les gravats dans le fossé au bout du champ. On nettoie et ça comble.

On recommence, alors ?

On hésite, aussi.

On tente de regarder l’anxiété au creux du ventre, au bout des yeux, dans le pli du sexe, lez zones friables de l’humain, mais rien à faire. Oui, bien entendu,  « ça recommence », d’écrire, et comme c’est inquiétant, sourd, lourd, fuyant. Mais aussi, quelle autre ligne de fuite plus certaine? Quel autre nacelle à hydrogène pour quitter la ville intérieure, alors que l’émeute du vide flambe sur sa propre absence ?

_______________________________________________________________________________________________Didier JOUAULT, pour YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode six : noué du col au bout de sa branche. .

A suivre, chaque semaine, ou presque, pour tant et tant de semaines qu’on a le temps. TROIS ANNEES, un peu commencées. Prochain épisode (on en saura plus sur Le Parrain) : mercredi 18 octobre, temps vespéral.

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YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode CINQ : Lire ceci, sans vous agacer, de préférence.

INCIPIT : On aurait pu commencer ainsi :  » Toutes les images disparaitront .  » ( Annie ERNAUX, « Les Années », Gallimard, 2008)
Mais on a choisi ça :

Note de Mme Frédérique.

« L’assez important volume que représentait, sur mon bureau, la Lettre de A.-Version B., titre inspiré de l’Incipit de «Port Soudan», était formé de textes très différents. Il s’agissait en général de tirages imprimés, parfois de notes encore manuscrites mais où les corrections (préparatoires à l’impression) paraissaient lisibles, d’une sous-enveloppe où se trouvait la clé USB «  Images » : de nombreuses photos en large partie récupérées sur le net, et même de quelques photocopies de passages d’ouvrages,

soigneusement référencés…

Il va de soi que l’ensemble, pas si disparate que mon  ex-patron paraissait l’affirmer, avait fait l’objet d’une préparation : presqu’un ordre de « saisie » pour un opus final, au moins dans sa version 1. Celle qui dit tout.

Seules les photos, peut-être, avaient été rangées par ordre de thèmes ( ou de personnages ) plus que par ordre chronologique. Un petit nombre de tirages papier provenait d’une époque à format carré, Noir et Blanc, bords dentelés.

Après avoir un peu fouillé, j’avais- je l’avoue- été surprise : si les femmes, et les histoires de femmes, foisonnaient, venues du réel ou tirées du virtuel ; si les représentations de « pendu » du Tarot semblaient anormalement nombreuses ; si ( bizarrement ai-je d’abord cru) des extraits de publicités par correspondance, pages pyjamas, et surtout des reproductions d’oeuvres peintes se froissaient au fond du dossier, on ne trouvait aucune photographie de MARCEL MALBEE, nommé M.M., Le Parrain dit Der PATE.

L’ensemble témoignait d’une réelle volonté d’organisation soigneuse, presque méticuleuse, sous un aspect facile, léger en somme. En cela, je retrouvais cet usage de mon ancien directeur, habitué à couvrir son anxiété par une couche  qu’on aurait dit de désinvolture. Souvent, cela lui avait nui auprès des Sérieux.

En tête figurait ceci   « Madame  Frédérique, ne m’en veuillez pas, mais si jamais vous vous engagez dans ce labyrinthe en trompe-l’œil, avec mes encouragements (comme toujours) il faudrait commencer par lire ceci, sans vous agacer, de préférence. »

J’avais donc lu : Citation liminaire ( encore Olivier ROLIN).

« Il y aura je le pressens pas mal de portraits de jeunes filles, jeunes femmes, beautés entrevues, touchantes, dans ce livre qui commence (j’ai bien l’air de commencer). Dois-je m’en excuser ? C’est ainsi : rien, dans le chatoiement immense du monde, ne m’a plus ému, rien, même pas la beauté de l’art, de certains tableaux, certaines pièces musicales que j’ai goûtées et écoute sempiternellement cependant que j’écris  (…) Entreprenant de relever quelques-unes des traces que le monde a déposées sur moi, qui m’ont dessiné, raturé, surchargé comme un palimpseste, je ne vois pas de raison de ne pas célébrer celles qu’y ont laissées, à leur  insu la plupart du temps, ces figures féminines qui furent un moment pour moi l’image de la beauté et de la joie.(…) la légèreté de ce qui vous ravit en passant puis que le vent ( le temps) emporte… certaines, je ne les ai même jamais vues ».

(Olivier ROLIN «  Extérieur au monde », page 22-23, toutes les citations proviennent de l’édition Folio de 2019) , signalait le dossier. Par la suite je me dispenserai  de redonner la source.)

Un deuxième feuillet d’imprimante-maison, en tirage vert clair,  présentait ceci :

…………………………………………BOB et MORANE :…….

« -Bonjour, dit BOB

-Bonjour, dit MORANE

– Tu crois qu’on peut commencer comme ça ? dit Morane après un temps (c’est une hésitante sans détente)

– Si on était dans un « roman« , on pourrait, dit Bob, sortant de sa tente et sans attente, toujours pressé de passer. Pas de parler. (C’est un mutique sans toc.)

– Mais, on n’est pas ? interroge Bob

– On n’est pas ! confirme Morane.

– Dans quoi on est, alors ?

-Ah, ça, on est dans la …

-La .. ? ici ? On est ?

-Pour sûr ! On y est ! »

MORANE et BOB ( détectives secrets et suspects, dectectives -ravages, engagés sur recommendation de FRED, ils mettront en oeuvre , dans de nombreux épisodes, leur talent de camouflage, voire de camouflet): ………………………………………………………….

Y.d’I ( je préserverai son anonymat, ceux qui le connaissent le reconnaissent) précisait :  « Rien de tel qu’une parodie affectueuse pour commencer. Pour recommencer, après tous ces temps de silence en ligne. »

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Didier JOUAULT, pour « YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, épisode CINQ : Lire ceci, sans vous agacer, de préférence. A suivre, une fois par semaine, plus ou moins- on verra ! Le prochain ( douloureux, initial) : « Noué du Col » est programmé ( quoi qu’il arrive ! )le mercredi 10 octobre. Désormais, sauf exception : chaque mercredi après- midi. Entre 14 et 17 heures. C’est ainsi

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